Comprendre l’affaire Ferrand

L’enquête autour de l’affaire immobilière des Mutuelles de Bretagne, ou affaire Ferrand, du nom de l’éphémère ministre et actuel président La République en marche (LaREM) de l’Assemblée nationale, poursuit son cours. Ce dernier, quatrième personnage de l’Etat, a été mis en examen pour prise illégale d’intérêts a annoncé dans la soirée du mercredi 11 septembre, le parquet. 

Richard Ferrand, président La République en Marche (LaREM) de l’Assemblée nationale, a été mis en examen dans la nuit de mercredi 11 à jeudi 12 septembre à Lille pour “prise illégale d’intérêts” dans l’affaire des Mutuelles de Bretagne.

Le président de l’Assemblée nationale est sous le coup d’une enquête dans le cadre de l’affaire des “Mutuelles de Bretagne”, révélée en mai 2017 par Le Canard Enchainé. Il n’entend pas quitter ses fonctions, disant avoir pris acte d’une “mesure procédurale qui va lui permettre de pouvoir se défendre”.

Le président de l’Assemblée nationale est sous le coup d’une enquête dans le cadre de l’affaire des “Mutuelles de Bretagne”, révélée en mai 2017 par Le Canard Enchainé. Il n’entend pas quitter ses fonctions, disant avoir pris acte d’une “mesure procédurale qui va lui permettre de pouvoir se défendre”.


Le quatrième personnage de l’Etat a aussitôt balayé toute velléité de départ, indiquant être“déterminé à poursuivre (sa) mission” à la tête de la Chambre basse. Le parquet de Lille a précisé que le locataire du “perchoir” de l’Assemblée a été mis en examen tard dans la soirée, à l’issue d’un “interrogatoire de première comparution” de près de 15 heures au tribunal de grande instance de Lille, où l’affaire a été dépaysée il y a un an. “Les trois juges d’instruction saisis du dossier ont décidé de mettre en examen Richard Ferrand pour prise illégale d’intérêts”, précise la juridiction

Richard Ferrand a vite répondu à cette annonce, disant avoir pris “acte de cette mesure procédurale qui va lui permettre de pouvoir se défendre dans ce dossier” et a assuré “rester serein sur l’issue de la procédure, au regard du classement sans suite de l’ensemble des griefs de la première plainte” en octobre 2017, “d’autant plus qu’aucun élément nouveau n’a été versé à ce dossier dans lequel il n’y a ni préjudice ni victime”. Le président de l’Assemblée a été entendu en audition libre (ce que l’immunité parlementaire n’empêche pas), du milieu de matinée jusqu’à 0h30.

♦ L’exécutif fait corps derrière Ferrand

Du côté de l’Elysée, Emmanuel Macron conserve “toute sa confiance” en Richard Ferrand, selon la porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye. Le président de l’Assemblée est “un homme loyal, droit, qui a un parcours politique exemplaire”, et “je crois que (ses jours dans ses fonctions) sont encore très longs”, a-t-elle déclaré dans la matinée de jeudi 12 septembre sur Europe 1, soulignant la nécessité de respecter le principe de la “présomption d’innocence”. Sa mise en examen va lui permettre d’accéder au dossier et “se défendre, batailler”. Son comparse LREM à l’Assemblée Gilles Le Gendre, président du groupe parlementaire, a quant à lui volé à son secours dès l’annonce de la mise en examen, disant sur franceinfo que “la mise en examen ne présume en rien de sa culpabilité”. “Je ne doute pas que l’examen des faits démontrera son intégrité”, a t-il encore estimé.
Dans l’histoire parlementaire française, la mise en examen d’un président de l’Assemblée nationale pendant son passage au perchoir est inédite. Laurent Fabius était déjà mis en examen dans l’affaire du sang contaminé au moment où il est redevenu président de l’Assemblée en 1997.

♦ Les “Mutuelles de Bretagne”, une affaire en deux temps 

L’affaire des Mutuelles de Bretagne avait conduit ce fidèle de la première heure d’Emmanuel Macron à quitter le gouvernement en juin 2017. A peine nommé ministre de la Cohésion des territoires, il avait été épinglé par Le Canard enchaîné qui avait révélé qu’en 2011 les Mutuelles de Bretagne, qu’il dirigeait alors, avaient décidé de louer des locaux commerciaux dans le centre-ville de Brest appartenant à sa compagne. Richard Ferrand conteste toute irrégularité.

Le procureur de Brest avait ouvert une enquête préliminaire en juin 2017, classée sans suite en octobre. Il avait invoqué la prescription s’agissant d’un éventuel délit de prise illégale d’intérêts et jugé que les infractions d’abus de confiance et d’escroquerie n’étaient “pas constituées”. L’association anti-corruption Anticor avait alors déposé une seconde plainte avec constitution de partie civile.


Richard Ferrand mis en examen : les appels à la démission se multiplient

Plusieurs responsables politiques, du Parti socialiste à Debout La France, estiment que le président de l’Assemblée doit quitter ses fonctions suite à l’annonce de sa mise en examen. La majorité, quant à elle, fait bloc autour du quatrième personnage de l’Etat.

“Difficilement tenable”

Parmi eux, le Premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure, ou encore président de Debout la France Nicolas Dupont-Aignan. La porte-parole des Républicains Lydia Guirous a, elle, estimé sur RFI que la position du président de l’Assemblée nationale, “quatrième personnage de l’Etat”, “va être très difficilement tenable sur le court terme”, tout en soulignant “la présomption d’innocence” et la nécessité de “laisser faire la justice”.

“La mise en examen ne signe pas la culpabilité mais la sérénité du débat public suppose que ceux qui exercent des fonctions institutionnelles nationales démissionnent en attendant la décision de justice”, a tweeté pour sa part Olivier Faure. Dans son argumentaire, le Premier secrétaire du PS rappelle une phrase de Christophe Castaner, rapportée par le Huffington Post en juin 2017. A l’époque, celui qui était alors porte-parole du gouvernement avait déclaré que “si Richard Ferrand était mis en examen, il serait immédiatement démis de ses fonctions”.

“Je demande à ce que Richard Ferrand démissionne de la Présidence de l’Assemblée nationale!”, a quant lancé Nicolas Dupont-Aignan sur Twitter: “Au plus haut sommet de l’Etat, Macronisme rime avec affairisme!”. Richard Ferrand a été mis en examen dans la nuit de mercredi à jeudi à Lille pour “prise illégale d’intérêts” dans l’affaire des Mutuelles de Bretagne.

Richard Ferrand rattrapé par ses tweets sur la mise en examen de François Fillon


12/09/2019 

Les paroles s’envolent, les écrits restent. Après la mise en examen de Richard Ferrand ce jeudi 12 septembre, les réactions sont nombreuses dans la classe politique. Alors que la majorité et l’Elysée font bloc autour du président de l’Assemblée nationale, des responsables de l’opposition, à l’image du socialiste Olivier Faure ou du député LR Philippe Gosselin, estiment que l’élu du Finistère n’est plus en condition de diriger les débats sereinement. 

Mais au delà de son maintien (ou non) au Perchoir, c’est la “présomption d’innocence” à géométrie variable de Richard Ferrand qui est pointée, notamment à droite. En cause, des tweets qu’il avait publiés en pleine campagne présidentielle, quand François Fillon, alors embourbé dans le “Penelope Gate”, avait été mis en examen pour détournement de fonds publics. 

L’ex-député socialiste s’en prenait à cette droite qui “voudrait que soit placé dans nos mairies et nos écoles le portrait d’un homme mis en examen, qui a perdu toute autorité morale”. Dans une autre publication, il tenait à peu près les mêmes propos concernant le candidat LR: “nous disons à François Fillon qu’il a perdu toute autorité morale pour diriger l’État et parler au nom de la France”. 

Des propos qui intervenaient dans un contexte où le candidat de la droite avait promis qu’il jetterai l’éponge en cas de mise en examen, et qui avait attaqué Nicolas Sarkozy sur ce point lors de la primaire de la droite. 

Ces deux tweets lui reviennent à la figure ce jeudi. “Fidèle à ma conception de la présomption d’innocence, je ne demande pas à Richard Ferrand de démissionner. Impliqué cependant dans une affaire concernant sa compagne, je ne peux cependant m’interroger sur le décalage entre ses propos d’hier sur Fillon et d’aujourd’hui”, tacle le député LR du Vaucluse Julien Aubert, joignant à sa publication une capture d’écran de l’un de ces tweets.

Et le candidat à la présidence des Républicains d’ironiser: “aux yeux de tous, il est arrosé, comme l’arroseur, pour ne pas dire douché ou rincé”. 

Même son de cloche pour le député LR Bruno Dive, qui reprend mot pour mot la citation de Richard Ferrand. 

Ces anciennes publications ont également été remarquées du côté du Rassemblement national. “Cher Richard Ferrand, ce message, daté du 4 avril 2017, vous est aujourd’hui destiné”, raille le cadre RN Jean Messiha, demandant au président de l’Assemblée d’en tirer “toutes les conséquences”, sous-entendu en démissionnant. 

Quand l’affaire des Mutuelles de Bretagne avait éclaté en juin 2017, le premier ministre avait fait savoir par la voix de Christophe Castaner que Richard Ferrand serait immédiatement démis de ses fonctions en cas de mise en examen. Mais à cette époque, l’intéressé était ministre, et non président de l’Assemblée nationale comme c’est le cas aujourd’hui. Un poste qu’il avait finalement été contraint de quitter avant sa mise en examen. 

Affaire Ferrand : l’enquête classée sans suite

publié le 14/10/2017

Le parquet de Brest n’a pas donné suite à l’affaire des mutuelles de Bretagne, dans laquelle l’ancien ministre Richard Ferrand était soupçonné d’abus de confiance et d’escroquerie.

Après plusieurs mois d’une tourmente politique et judiciaire, Richard Ferrand voit l’enquête qui le concerne classée sans suite“Je peux enfin retrouver ma totale liberté d’esprit […] Désormais, je suis libéré de l’interrogation que les uns et les autres pouvaient avoir, puisque la justice a tranché et a dit que j’étais un homme honnête et innocent de toute infraction”, a déclaré le président du groupe LREM à l’Assemblée nationale.

Aucune infraction retenue

L’affaire avait débuté quelques jours seulement après l’élection d’Emmanuel Macron à l’Élysée. Alors qu’il venait d’être nommé ministre de la Cohésion des territoires, Richard Ferrand avait été accusé d’abus de confiance et d’escroquerie dans l’affaire des mutuelles de Bretagne. Il lui était notamment reproché d’avoir favorisé son ex-femme et sa compagne dans l’obtention de différents contrats. Le parquet de Brest a jugé qu’“aucune infraction au code de la mutualité n’a été établie” et que les infractions en question “ne sont pas constituées”.

En tant que lanceuse d'alerte de cette affaire, je ne peux que me réjouir du professionnalisme des juges d'instruction…

Publiée par Tiphaine Beaulieu sur Mercredi 11 septembre 2019