Écrans, attention ! Poisons lents !

« Il y a un effondrement du langage et du QI dans cette nouvelle génération connectée »

Sommes-nous en train de devenir des crétins ? « Le QI n’a jamais été aussi bas qu’aujourd’hui ! », affirme le docteur en neurosciences Michel Desmurget
Dans son livre « La fabrique du crétin digital », le docteur en neurosciences Michel Desmurget dénonce le danger des écrans pour le développement des enfants.

La consommation du numérique sous toutes ses formes – smartphones, tablettes, télévision, etc. – par les nouvelles générations est astronomique. Dès 2 ans, les enfants des pays occidentaux cumulent chaque jour presque 3 heures d’écran. Entre 8 et 12 ans, ils passent à près de 4 h 45. Entre 13 et 18 ans, ils frôlent les 6 h 45. En cumuls annuels, ces usages représentent autour de 1 000 heures pour un élève de maternelle (soit davantage que le volume horaire d’une année scolaire), 1 700 heures pour un écolier de cours moyen (2 années scolaires) et 2 400 heures pour un lycéen du secondaire (2,5 années scolaires).

Contrairement à certaines idées reçues, cette profusion d’écrans est loin d’améliorer les aptitudes de nos enfants. Bien au contraire, elle a de lourdes conséquences : sur la santé (obésité, développement cardio-vasculaire, espérance de vie réduite…), sur le comportement (agressivité, dépression, conduites à risques…) et sur les capacités intellectuelles (langage, concentration, mémorisation…). Autant d’atteintes qui affectent fortement la réussite scolaire des jeunes.
 » Ce que nous faisons subir à nos enfants est inexcusable. Jamais sans doute, dans l’histoire de l’humanité, une telle expérience de décérébration n’avait été conduite à aussi grande échelle « , estime Michel Desmurget.

Ce livre, première synthèse des études scientifiques internationales sur les effets réels des écrans, est celui d’un homme en colère. La conclusion est sans appel : attention écrans, poisons lents !

La grande confusion entre le « frottage » d’écran et les compétences !

Ce qu’il y a de « fascinant » lorsque j’observe les gens avec leurs enfants, et je suis persuadé que vous avez aussi vécu cette scène, c’est la fierté de parents dont les enfants frottent avec aisance les écrans tactiles au hasard des téléphones.

Pourtant savoir utiliser un outil conçu pour être simple, ne dénote strictement aucune compétence, ou aptitude particulière. Le « boulot » d’Apple (et de toutes les autres entreprises de la Silicon Vallye) c’est justement de rendre aussi simple que possible l’utilisation de tous leurs i-bidules !

Pour le dire autrement, lorsque vous concevez un jeu, une application ou n’importe quel autre outil informatique, vous devez le concevoir pour que même un abruti mâtiné d’un crétin puisse s’en servir !! Et même comme ça, croyez-moi ce n’est pas facile. Faire simple est très compliqué.

Il y a donc une immense confusion qui est faite entre compétences, connaissances et… utilisation d’outils avec plus ou moins d’utilité. L’utilisation des réseaux sociaux ne développent aucune compétences chez nos enfants. La présence d’écran, le fait d’être « à l’aise » avec tous ces appareils connectés ne fait en aucun cas de vous un développeur, un codeur, ou un type talentueux. Vous n’êtes qu’un utilisateur parmi des milliards d’autres. Nos enfants ne réalisent aucun exploit lorsqu’ils frottent les écrans.


Les Digital Natives sont ceux qui ont le moins de connaissances… numériques !!

Avouez que là je vous en bouche un coin ! Ceux qui sont le plus à l’aise avec les ordinateurs et autres smartphones sont ceux qui ont le moins de connaissances…

Voici ce qu’en dit cet article du mois de juin 2018 du Figaro consacré aux compétences numériques des salariés :

« Basée sur un panel représentatif (âge, profession, zone géographique…) d’un millier d’actifs français, l’étude aborde huit ensembles thématiques précis allant de la cybersécurité, à la data, en passant par la culture web, l’e-commerce ou encore le web-design. Or, sur 1000 points, les salariés français obtiennent le médiocre score de 291 en moyenne, soit un peu moins de 3/10, avec 40% de réponses de «je ne sais pas» pour l’ensemble du QCM. Et ce, quelles que soient les générations…

Les « digitales natives » (génération 80-90) ont même moins de connaissances dans le domaine que la génération X (60-70), avec un score de 270 contre 285 pour leurs aînés. « Les jeunes générations d’actifs ont grandi avec le début du numérique, ils ont donc une aptitude intuitive de l’utilisation des outils informatiques. Mais ils ne détiennent pas davantage de connaissances théoriques pour autant », souligne Alexandre Beaussier pour expliquer cette différence ».

Pour résumer, les plus nuls et les moins compétents, sont les plus jeunes et ceux qui ont la meilleure aptitude à l’utilisation, mais pas du tout à la conception… Savoir envoyer des textos ce n’est pas savoir le logiciel de traitement de texte Word, ni savoir taper rapidement sur un clavier. Savoir gagner au jeu Fortnite (un truc super violent à la mode) n’a rien à voir avec les compétences nécessaires à l’utilisation des formules et autre « macro » du logiciel Excel ! Passer du temps sur sa console ou sur les réseaux sociaux, ce n’est pas apprendre à coder, ni se familiariser avec les langages informatiques !

Plus grave, le temps que vous passez en temps que simple utilisateur, c’est du temps en moins passé à devenir un « concepteur » ! Pour aller un peu plus loin, pour acquérir des compétences, et des connaissances, il faut travailler, or l’utilisation intensive de tous ces écrans, poussent en réalité les enfants à nettement moins travailler. Comme le dit Michel Desmurget, les temps passés sont totalement extravagants.

Ils ne sont pas importants, ou trop importants, ils sont extravagants.

Young girl sitting at home on settee and using a child’s tablet touch screen computer

Un ordinateur ne transforme pas un crétin en prix Nobel !

Vous pouvez mettre autant d’ordinateurs que vous voulez dans les écoles, la réalité, c’est qu’un ordinateur ou une tablette ne transformeront jamais un cancre en bon élève.

Ce qui fait d’un gamin un bon élève c’est l’acquisition massive de mots et de langage pour exprimer une pensée riche et être capable de se structurer pour acquérir des connaissances de plus en plus complexes.

Le langage est la toute première des compétences.

Dès lors vous avez deux catégories d’enfants. Les biens nés, dans une famille qui maîtrise plus de 500 mots et qui va consacrer du temps à l’enfant en bas âge. Les « pas de chance » pour qui tout sera plus difficile et parfois impossible, parce né dans un environnement culturellement asséché et pauvre.

Toute politique sociale, culturelle, toute politique d’éducation ou d’instruction ambitieuse devrait en tout premier lieu se pencher sur cette problématique et mettre en place des outils permettant d’enrichir le niveau de vocabulaire et de pensée des moins favorisés.

Les écrans, introduisent en réalité un terrible inégalité entre les individus en général et les enfants en particuliers.

Écrans : le vrai du faux sur la santé des enfants par Michel Desmurget, chercheur en neurosciences

Rentrée: les livres

Nous vous recommandons deux autres livres, particulièrement documentés  où la langue de bois, le discours mou et complice des industries du numérique est absent. Pas sûr cependant que ces ouvrages soient très diffusés et commentés par les grands médias. A vous de les partager et de les diffuser.

Plus l’école et l’éducation sont présentées comme étant en crise, plus l’utopie numérique y multiplie les promesses. Les injonctions permanentes à innover, à être optimistes, à individualiser les parcours, à se réinventer, à disrupter… imposent partout le numérique. Même s’il existe une grande variété de situations en matière d’équipements informatiques selon les niveaux et les établissements, l’idée que l’école telle qu’on la concevait jusqu’alors est obsolète et qu’elle doit, coûte que coûte, s’adapter à un monde contemporain ultraconnecté, a triomphé. Ainsi, dirigeants économiques, intellectuels et politiques ne cessent d’appeler enseignants et pédagogues à céder devant l’impératif d’un prétendu progrès technique abstrait, et à s’en remettre les yeux fermés aux apprentis sorciers de la Silicon Valley.

La culture de masse toujours contre les peuples – Dirigé par Cédric Biagini et Patrick Marcolini

Visionnage boulimique de séries, addiction aux jeux vidéo, gamification des activités sociales, consommation devenue divertissement ordinaire, pornographie banalisée, invasion des musées par les marques, etc. Plus aucun espace n’échappe aux productions culturelles du capitalisme hypermoderne. Le culte du fun et de la transgression, le refus immature des contraintes, la quête de sensations fortes, l’exaltation du narcissisme et les bricolages identitaires, fabriquent un nouveau type d’individu.
Face à cette déferlante, journalistes, chercheurs et intellectuels, y compris les plus subversifs – et peut-être même surtout eux –, ont rendu les armes. À tel point que certains voient dans la culture de masse l’art de notre temps, démocratique et… rebelle. D’autres se contentent d’y dépister les stéréotypes et les rapports de domination et de fantasmer une possible réappropriation des contenus.
Ce livre prend le contre-pied de ces abdications. Il s’inscrit dans une tradition de critique de l’aliénation, du spectacle et des modes de vie capitaliste, qu’il ravive en démontrant comment les derniers avatars de la culture de masse, omniprésents et plus efficaces que jamais, laminent les sociétés et domestiquent les esprits.

Les pathologies à l’ère numérique par Manfred Spitzer

En s’appuyant sur de très nombreuses recherches et études scientifiques internationales, le grand psychiatre et spécialiste du cerveau Manfred Spitzer montre à quel point notre dépendance aux technologies numériques menace notre santé, tant mentale que physique. Elles provoquent chez les enfants et adolescents comme chez les adultes de nouvelles maladies et en rendent d’autres plus fréquentes : baisse des performances cognitives, troubles du sommeil, dégradation des capacités d’attention et de concentration, tendance à l’isolement et au repli sur soi, dépression, disparition du sentiment d’empathie, etc. Et même, chez les plus jeunes, baisse de la motricité et des capacités de perception.
Ce vaste tableau des connaissances scientifiques sur les effets des écrans, enfin traduit en français, a rencontré un immense écho en Allemagne et dans le monde entier où il a provoqué nombre de débats et de prises de conscience. Cette synthèse majeure s’articule à une réflexion critique profonde qui ne se contente pas de lancer l’alerte sur les cyberpathologies. Elle nous apprend aussi à nous en protéger et à agir à titre préventif. Une contribution absolument cruciale pour tenter d’éviter un désastre psychologique et social.

À PARAÎTRE LE VENDREDI 18 OCTOBRE 2019

Source : www.sabineduflo.fr/rentree-les-livres/

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