Corruption, Transparency épingle Malte et le Brésil, la France classée 23e

En marge du Forum de Davos, Transparency International a présenté son rapport sur la corruption dans le monde pour l’année 2019. Malte et le Brésil de Bolsonaro sont pointés du doigt. La France prend la 23e place du classement annuel de cette ONG.

L’ONG Transparency International épingle Malte, toujours embourbée dans la corruption, et le Brésil, victime d’ingérences de Jair Bolsonaro dans les organes anti-corruption, dans son rapport annuel publié le jeudi 23 janvier.

Le classement des pays les moins corrompus reste dominé comme les années précédentes par les pays nordiques, avec le Danemark en tête, devant la Nouvelle-Zélande (2e). La Somalie reste en bas du classement, derrière le Yémen, la Syrie et le Soudan du Sud.

La France, elle, prend la 23e place, en recul par rapport aux années précédentes : noté 69/100 en 2019, notre pays avait recueilli de meilleures notes auparavant, 72/100 en 2018 et 70/100 en 2017.

180 pays classés

Transparency International classe chaque année 180 pays en fonction de leur niveau perçu de corruption dans le secteur public.

L’organisation non gouvernementale pointe notamment la situation de Malte, marquée par le meurtre en 2017 de la journaliste Daphne Caruana Galizia et la mise en cause d’une partie de la classe politique, dont l’ex-Premier ministre Joseph Muscat.

L’île est ainsi, selon TI, embourbée dans la corruption et son gouvernement traîne des pieds dans des procédures judiciaires.

Plusieurs scandales liés aux Panama Papers ou au dispositif des visas d’or, qui permet d’accorder la nationalité maltaise à des investisseurs étrangers fortunés contribuent également à la baisse de Malte au classement, explique TI.

La corruption reste l’un des plus grands obstacles à la croissance économique et au développement social du Brésil, relève aussi TI dans son rapport annuel.

Delia Matilde Ferreira Rubio, responsable de l’ONG Transparency International, lors de sa conférence de presse à Davos, le 23 janvier 2020.
ALESSANDRO DELLA VALLE / EPA-MAXPPP

CARTE. Dans quels pays le niveau de corruption est-il le plus élevé ?

https://www.transparency.org/cpi-2019-embed/map.html

Les délations récompensées

Le président Bolsonaro avait mis durant sa campagne, en 2018, la lutte contre la corruption au cœur de son programme mais le Brésil, déplore TI, a essuyé dans ce domaine une série de revers juridiques et institutionnels.

L’ONG dénonce une ingérence politique croissante dans les institutions de lutte contre la corruption par le président Bolsonaro, ou encore des décisions de la Cour suprême qui compliquent la lutte anti-corruption, comme l’annulation de confessions négociées ou de délations récompensées.

Un bon point est en revanche donné à l’Angola, qui sort de quatre décennies de dictature. Si le pays reste bien en dessous de la moyenne mondiale, la lutte contre la corruption produit des effets.

Transparency International salue en particulier le limogeage d’Isabel Dos Santos, fille de l’ex-président Jose Eduardo dos Santos, de la compagnie nationale pétrolière Sonangol.

Celle qui fut proclamée première milliardaire d’Afrique par le magazine américain Forbes en 2013 a été accusée d’avoir siphonné les caisses du pays, lundi par le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ).

Cliquez pour agrandir

Indices de perception de la corruption de Transparency International

La corruption étant par définition un phénomène caché, il est, faute de données brutes disponibles, impossible de produire de statistiques objectives permettant de mesurer ses niveaux. Se fonder sur le nombre de condamnations pour corruption prononcées par les tribunaux ne serait pas satisfaisant car de telles données seraient dans de nombreux cas davantage révélatrices du bon fonctionnement de la justice d’un pays que des niveaux réels de corruption. Ainsi, dès 1995, Transparency International a imaginé se fonder sur des enquêtes d’opinion – et donc des perceptions – pour tenter d’évaluer les niveaux de corruption.

Municipales 2020 : «Restaurons la confiance par la transparence et l’intégrité !»

Dans une tribune au Parisien-Aujourd’hui en France, le président de Transparency International France, Marc-André Feffer, appelle les candidats au scrutin de mars à s’engager sur six mesures simples pour progresser dans l’exemplarité des élus.

Par Opinion Le 19 janvier 2020

Marc-André Feffer, président de Transparency International France

« Un constat s’impose : les citoyens sont de plus en plus exigeants quant à l’exemplarité de leurs élus. Si le maire est l’élu « préféré » des Français, la crise de confiance politique reste vive, alimentée par des pratiques que l’on rêverait de pouvoir qualifier « d’un autre temps ». Injustement, celles-ci occultent les progrès réels enregistrés depuis la loi pour la transparence de la vie publique de 2013, et remettent en question l’intégrité d’une large majorité d’élus locaux.

Pour répondre à cette appréciation sévère, les candidats aux prochaines élections municipales n’ont plus le choix : leur engagement en matière d’intégrité leur est imposé par leur électorat et ils ont les moyens de faire basculer notre société de l’ère du soupçon à celle de l’intégrité.

Pour relever ce défi, Transparency International France leur propose de s’engager sur six mesures simples.

L’adoption d’un plan de prévention de la corruption est un préalable essentiel sur lequel 80 % des villes de plus de 50 000 habitants font pourtant l’impasse. Ce plan inclut des mesures importantes comme un dispositif de recueil des alertes, la formation d’élus et d’agents au risque pénal ou la cartographie des risques de corruption.

De même, la publication en open data des données administratives, notamment budgétaires, et des décisions d’attribution, comme les logements sociaux ou les places en crèche, laisse encore trop souvent à désirer. Bien que prévue par la loi, cette mesure est encore insuffisamment mise en œuvre par les collectivités et souvent de façon peu lisible pour les citoyens.

Par ailleurs, les conflits d’intérêts, réels ou supposés, minent la confiance des citoyens. Nous proposons la création d’un « registre public de déport », pour rendre publiques les décisions par lesquelles un élu s’abstient de participer à une décision où il se trouverait en conflit d’intérêts.

La transparence en matière d’indemnités des élus doit également être garantie. S’il est nécessaire de donner aux élus les moyens d’assurer leurs mandats dans de bonnes conditions, ces moyens doivent être attribués en toute transparence. Nous proposons donc que les élus rendent public le montant de la totalité des indemnités qu’ils perçoivent. Il en va de même pour les frais de représentation mis à disposition des responsables d’exécutifs locaux. Les quelques dérives constatées pourraient être évitées par la création d’un référentiel des dépenses autorisées, un meilleur encadrement et une publication des dépenses opérées.

Enfin, le lobbying est une question qui ne manquera pas de se poser avec une acuité croissante au niveau local. Les élus locaux pourraient y répondre en publiant leurs rendez-vous avec des représentants d’intérêts.

Les temps ont changé. Nombre d’élus ont compris que la transparence n’est pas une contrainte, mais une exigence démocratique. Engageons-nous ensemble à faire du prochain mandat municipal celui de la transparence et de l’intégrité ! »

Comments are closed, but trackbacks and pingbacks are open.