Uber Eats, Delivroo & les restos fantômes

Avec le développement des livraisons de repas à domicile, les restaurateurs essaient de s’adapter. Depuis deux ans, les « restaurants fantômes » ou « virtuels » font leur apparition. Ils n’ont pas de devanture, pas de serveurs, et pour cause : ils ne sont accessibles que via Internet.

Face à l’engouement des consommateurs pour la livraison à domicile, des restaurateurs ont décidé de s’adapter à la nouvelle demande. Le principe est simple, ils n’accueillent plus les clients dans leur établissement. Ils existent uniquement sur les plateformes de livraison à domicile. 

Les clients se laissent séduire par la facilité et le confort de la livraison à domicile. En 2018, près de 160 millions de repas ont été livrés en France, principalement par l’intermédiaire de grands groupes comme Uber Eats ou Deliveroo. Bien qu’accusées de malmener leurs employés, ces plateformes continuent de vouloir chambouler le monde de la restauration. 

Restaurants virtuels, un atout économique(?)

Ces restaurants sont 100% en ligne et donc uniquement disponibles sur les applications de livraison. Un vrai atout économique pour les propriétaires puisque les dépenses liées au service en salle (serveurs, matériel) sont désormais inutiles. 

Ils n’ont donc plus besoin d’un grand espace pour accueillir les clients. Tout ce qu’il leur faut, c’est une cuisine. En France près de 500 restaurants virtuels sont répertoriés sur l’application Uber Eats. La plateforme a d’ailleurs créé la première chaîne de « restaurant fantôme » en France avec Maison Poké qui propose des plats hawaïens. 

Des cuisines partagées par les restaurants

Deliveroo s’est lancé dans un nouveau concept en 2017 avec Deliveroo Editions. Son but : réunir des restaurants qui existent déjà dans un même espace pour ensuite livrer les repas. Un gain de temps et d’argent pour les restaurateurs. Ils cuisinent alors des plats réservés à la livraison en plus des mets cuisinés dans leurs restaurants traditionnels et multiplient donc leur chiffre d’affaires. 

Deliveroo choisit des zones où le choix des restaurants est limité. En France, le premier Deliveroo Edition a été ouvert à Saint-Ouen au nord de Paris. Dans un ancien entrepôt de 700 m²,  douze « cuisines partagées » ont été installées. 

Deliveroo a ouvert des locaux à Saint-Ouen où douze cuisines réservées aux livraisons sont créées pour accueillir des restaurants – PHOTO : AFP / GERARD JULIEN

Des restaurants comme Le Petit Cambodge, Santosha ou Tripletta, se retrouvent donc réunis au même endroit pour préparer les mets qui seront ensuite livrés dans la capitale, dans un périmètre de 2,5 kilomètres autour de l’entrepôt. 

Une nouvelle façon de concevoir la restauration qui permet aux établissements d’étendre leur champ d’action mais qui éloigne encore un peu les consommateurs de la convivialité des restaurants. 

Combien gagne en moyenne un livreur Uber Eats ?

Attention:
– Le 3 février 2020, Uber Eats a ouvert une filiale en France (anciennement l’entreprise était domiciliée aux Pays-Bas) et a supprimé les frais de services tout en mettant à jour sa tarification !
– Uber Eats propose une nouvelle tarification qui depuis le 25 septembre 2019. Les coursiers inscrits à partir de cette date seront automatiquement soumis à ce nouveau régime. Ceux inscrits avant auront le choix entre les deux modèles.

Pas le même montant selon la ville dans laquelle il roule et le modèle de tarification ! En effet, un coursier Uber Eats sur Paris ne gagnera pas la même chose qu’un coursier pour la même enseigne en Province. Les barèmes sont légèrement différents, et voici les cas de figures qui serviront de base au calcul:

Nouveau Modèle et contrat signé après 25/09/19

  • Paris: 
    • 2.85 €/course + 0,81 €/km.
  • Autres villes: 
    • 2.85 €/course + 0,76 €/km. 
  • Frais de service: 0%

Nouveau modèle et contrat signé avant 25/09/19

  • Paris :
    • 2.63€/course + 1.05€/km.
  • Autres villes :
    • 2.63€/course + 0.98 €/km.
  • Frais de service: 0%

Ancienne tarification (contrats avant 25/09)Nouvelle tarification (contrats avant 25/09)Ancienne tarification (contrats après 25/09)Nouvelle tarification (Contrats après 25/09)
Paris
Prise en charge au restaurant2.50€1.88€2.00€1.90€
Distance au Km1.40€1.05€0.85€0.81€
Remise au client1.00€0.75€1.00€0.95€
Frais de services25%0%5%0%
Autres villes
Prise en charge au restaurant2.50€1.88€2.00€1.90€
Distance au Km1.30€0.98€0.80€0.76€
Remise au client1.00€0.75€1.00€0.95€
Frais de services25%0%5%0%

Si l’ancienne tarification rémunère mieux à la course et au kilomètre, les frais de service sont en revanche beaucoup moins importants ! 0% avec le nouveau modèle versus 25% avec l’ancien. Gros avantage: Ce que vous gagnez et déclarez est désormais égal à votre chiffre d’affaires réel.

Source : https://lescoursiersfrancais.fr/faq-livreur/combien-gagne-un-livreur-uber-eats/#Combien_gagne_en_moyenne_un_livreur_Uber_Eats

Uber Eats, caillou dans la chaussure d’Uber sur le chemin de la rentabilité

Malgré des pertes de 8,5 milliards de dollars sur l’année 2019, le groupe californien a promis aux investisseurs qu’il dégagera un bénéfice au titre de son quatrième trimestre 2019. Il lui faudra pour cela adapter sa stratégie à sa division de livraison de repas, qui accuse un lourd déficit dans un environnement hautement concurrentiel.

Par Lucas Mediavilla Publié le 9 févr. 2020

Le compte à rebours est lancé pour Uber. Son patron Dara Khosrowshahi l’a promis aux investisseurs, la société américaine compte réaliser un bénéfice au titre de son quatrième trimestre 2020, soit un an plus tôt que prévu . L’annonce a suscité l’euphorie à Wall Street vendredi, où le titre a réalisé ni plus ni moins que sa meilleure séance depuis l’introduction, clôturant en hausse de 9,5 % .

Le chemin vers la rentabilité n’a rien d’une autoroute dégagée pour le géant des VTC dont le déficit accumulé pour l’année 2019 s’élève à 8,5 milliards de dollars (dont 4,6 milliards liés à des rémunérations en actions lors de l’introduction). Uber l’a cependant répété à maintes reprises. En arrêtant de brûler du cash pour nourrir son hypercroissance aux quatre coins du globe, la société serait déjà rentable.

Pourquoi Uber est un investissement à risques

Après des années dans le rouge, le géant de la mobilité semble désormais prêt à réaliser ce virage. Mais pour retourner à l’équilibre dès la fin de l’année 2020, le groupe californien devra adapter sa stratégie de frugalité notamment à sa filiale Uber Eats. Un peu moins de 6 ans après sa création, la division de livraison de repas connaît une croissance rapide, pesant déjà près de 18 % des revenus du groupe, 2,5 milliards de dollars en 2019 (+73 % sur un an, contre 20 % pour le service de VTC classique).

Pertes colossales

Celle-ci à néanmoins un coût. Au dernier trimestre, Eats a enregistré une perte de 461 millions de dollars (contre 1,1 milliard au total pour Uber), 66 % de plus que l’an passé à la même époque. Sur un an, les pertes totales se chiffrent même 1,3 milliard de dollars, alors que l’activité de réservation de voiture est de son côté devenue rentable.

En cause, un environnement différent d’une activité à l’autre. A la différence d’un marché des VTC en train de se stabiliser, celui de la livraison de repas est encore soumis à une concurrence féroce . Uber Eats, loin d’être précurseur sur ce marché, doit batailler ferme pour exister, multipliant les rabais et promotions, ainsi que les incitations financières pour recruter ses livreurs (1,13 milliard rien que sur l’année 2019, soit 45 % du chiffre d’affaires d’Uber Eats).

Livraison de repas : Deliveroo et Sodexo s’associent sur le marché français

Dans une étude publiée cet été, les analystes de la banque d’investissement Cowen ont estimé qu’à chaque commande passée sur Uber Eats en 2020, le groupe perdait en moyenne 3,36 dollars. Si la perte diminuera à 46 cent par commande d’ici 2024, l’étude de la banque ne donne aucun calendrier sur un futur point d’équilibre pour sa filiale.

Changer de cap

Trouver l’équilibre entre la croissance de Eats et rentabilité ne sera pas une mince affaire pour le groupe californien. Mais Uber est bien déterminé à tenir sa promesse aux investisseurs. Fin janvier, la société a revendu sa division indienne d’Uber Eats à son rival Zomato, celle-ci représentant environ 10 % des pertes du groupe au dernier trimestre.

L’entreprise a aussi quitté le marché sud-coréen de la livraison de repas en septembre… et ne compte pas s’arrêter là. « Vous devriez vous attendre à ce que nous continuons à faire des choix », a glissé le directeur financier aux analystes. Dara Khosrowshahi l’a confirmé dans une interview à CNBC vendredi : dans chaque pays où Uber Eats ne pourra pas devenir le premier ou deuxième acteur du marché, il se retirera.

2010-2019 : une comète nommée Uber

Si elle se fait attendre, Uber compte aussi sur une consolidation prochaine du secteur. La fusion entre Just Eat et Takeaway, pourvu qu’elle soit validée par le régulateur , est un premier signal. Selon le « Financial Times », Uber et Doordash (50 % des parts de marché américain à eux deux), avaient aussi envisagé une fusion mais les discussions n’ont pas abouti. 

Cette consolidation permettrait à Uber de réduire ses coûts d’acquisition clients et livreurs, et donc de doper son résultat net, à l’image de ce qu’elle fait désormais pour le service de VTC.

Publié le 9 févr. 2020

Pourquoi vous mangez dans des restaurants fantômes sans le savoir

Les restaurants virtuels inondent en silence les plateformes de livraison. Vos commandes Deliveroo et Uber Eats proviennent désormais parfois d’un restaurant fantôme.

Vous n’avez pas fini de voir le ballet des livreurs, le soir venu devant des locaux anonymes. Les « dark kitchens » se développent à grande vitesse en France. Ces cuisines fantômes n’arborent aucune enseigne sur la rue, et encore moins sur Google Maps. Nul besoin de salle, ni de serveurs. Deliveroo et Uber Eats poursuivent ainsi leur entreprise de démolition des structures traditionnelles de la restauration, poussées par la demande aveugle du consommateur.

Plus de 1.000 restaurants virtuels dans le monde sont déjà référencés sur la plateforme Deliveroo, qui compte arriver à 2.000 d’ici la fin d’année. Uber Eats n’est pas en reste avec 500 cuisines fantômes revendiquées en France sur les 15.000 référencées sur l’application. Et l’Américain espère en compter le double d’ici six mois.

La start-up Taster est le meilleur exemple de cette folie pour les cuisines virtuelles, disponibles uniquement à la livraison. Créée il y a deux ans, l’entreprise montée par un ex salarié de Deliveroo a déjà levé 13 millions de dollars pour ses trois « concepts »: Mission Saïgon et ses bo-buns, O Ke Kai et ses poke bowls hawaïens sans oublier Out Fry et son poulet frit coréen.

Taster compte aujourd’hui une dizaine de cuisines entre Paris, Londres et Madrid. Et elle envisage d’en ouvrir encore une quinzaine dans ces trois capitales européennes pour densifier son maillage, tout en élargissant son offre avec trois nouveaux « concepts » supplémentaires. « Notre ambition, c’est de construire le McDo du XXIe siècle, affirme sans sourciller Anton Soulier, fondateur de la start-up. Grâce aux data qu’on récupère, on a mis en place des algorithmes pour prévoir les besoins pour chaque cuisine. Et on a même mis en place un outil automatisé pour commander les produits aux fournisseurs. »

Incompatibilité avec un resto traditionnel

L’intérêt de ces cuisines fantômes a fini par convaincre les restaurateurs traditionnels de Dark Kitchen, qui ont multiplié les créations de restaurants virtuels. « On s’est rendu compte du potentiel de la livraison en arrivant sur Uber Eats il y a trois ans, se souvient Jean Valfort, cofondateur de la start-up. Sauf qu’avec la croissance des demandes, il y a une incompatibilité structurelle avec le restaurant traditionnel. Quand on a des clients en salle, on s’occupe d’eux en priorité. La livraison passe après et cela peut créer une expérience désagréable avec des produits dégradés qui ne sont pas adaptés à la livraison. »

Dark kitchen a levé un million d’euros pour avoir huit cuisines à Paris et à Bordeaux d’ici à la fin d’année pour une moyenne de trois restaurants différents par emplacement. « On investit 150.000 euros pour monter une cuisine, explique Jean Valfort. On trouve des restaurants avec un petit loyer, il suffit de les équiper. Les fonds nécessaires sont divisés par dix par rapport à un restaurant traditionnel. Et c’est comme pour les usines de lessive, les gens ne savent pas que, suivant les marques, tout vient du même endroit. » 

Plateformes à la manoeuvre

Toutes les plateformes de livraison de repas poussent pour faire croître ce marché. Deliveroo loue des cuisines à des restaurateurs à Saint-Ouen et à Courbevoie, spécifiquement destinées à la livraison. Mais l’entreprise pousse également des restaurants traditionnels sur sa plateforme à créer de nouvelles marques virtuelles. « Pendant l’hiver, on va proposer à un restaurant de burgers, par exemple, de développer une marque en ligne spéciale de poutines, explique Deliveroo. Grâce aux données que nous avons, on peut déterminer sur une zone donnée, quel type de restaurant il va manquer. »

La société anglaise ne manque pas de vanter à l’appui de sa démarche « ces marques virtuelles qui permettent d’optimiser les coûts des restaurateurs en réduisant les pertes de matières premières tout en réduisant les temps morts dans les cuisines ». Deliveroo va même jusqu’à fournir les recettes aux restaurateurs des plats qu’il aimerait voir sous peu sur sa plateforme.

Guerre des données

Une démarche que rejette son principal concurrent américain, Uber Eats. « On ne loue pas des cuisines et on ne fournit aucune recette, précise Stéphane Ficaja, directeur général de la plateforme pour la France et la Belgique. Notre expertise se situe dans le marketing et la technologie. » La plateforme a préféré lancer un partenariat avec Côté Sushi pour lancer sa marque virtuelle de poke bowls hawaïens baptisée Maison Poké, vendus entre 9 et 15 euros. Elle dessert actuellement vingt villes en France.

Les burgers parisiens, ultra branchés, de Blend ont choisi un mode de développement mixte. Après avoir testé les cuisines en location Editions de Deliveroo à Saint-Ouen pendant un peu moins d’un an, l’entreprise a opté pour l’ouverture de ses propres « cuisines fantômes ». « Quand on travaille avec Deliveroo, la plateforme prend une commission substantielle [autour de 40%, NDLR], mais surtout ils gardent la main sur les clients et les données, juge Charles Van den Broek, directeur général de l’enseigne de burgers. Bien sûr le chiffre d’affaires explose mais on ne se fait pas une marge importante, et surtout on ne capitalise pas sur la clientèle. » Résultat, deux cuisines fantômes de Blend dédiées à la livraison ouvriront à la rentrée à Paris. L’occasion pour Blend de se diversifier en lançant spécialement ses « Vilain hot dogs » en livraison.

Néanmoins, demeure une question centrale. Un consommateur fait-il aujourd’hui autant confiance à une marque de restaurant virtuelle qu’à son resto préféré au coin de la rue ? Pour l’expert du secteur, Benard Boutboul, directeur de Gira Conseil, la réponse est évidente. « Les Français se méfient toujours à l’idée de se faire livrer par un restaurant qui n’a pas pignon sur rue. La vente à emporter prédomine encore très largement sur la vente en ligne. Des doutes demeurent sur ces restaurants fantômes et les conditions de préparation, où les gens ne peuvent aller manger. » 

Son de cloche totalement opposé pour Uber Eats selon qui, « les consommateurs se moquent totalement de savoir d’où vient la nourriture, tant qu’ils ont la qualité et le choix qu’ils désirent ». L’expert de la restauration ne table pas sur une explosion de la livraison en France « avant cinq à sept ans, quand la génération Z aura un pouvoir d’achat plus important. » Et il mise sur « un acteur qui est en train de se préparer en silence dans ce domaine: Amazon ». Un acteur qui vient d’investir 515 millions de d’euros dans Deliveroo.

Par Adrien Schwyter le 04.07.2019

Comments are closed, but trackbacks and pingbacks are open.