GendNotes, le fichage d’opinions politiques, orientations sexuelles, religieuses, …

Ne venez pas nous dire que la démocratie, c’est ça !

La collecte et le traitement des données à caractère personnel : origine raciale ou ethnique, opinions politiques, philosophiques ou religieuses, appartenance syndicale, santé ou vie sexuelle ou l’orientation sexuelle sont possibles, même si l’on nous précise, « qu’en cas de  nécessité absolue ».


La twittosphère s’est échauffée pendant le week-end après la publication le 20 février 2020 au Journal Officiel du décret portant autorisation d’un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « application mobile de prise de notes » (GendNotes). Intégrée aux smartphones et tablettes Neogend, cette application permet aux gendarmes de prendre des notes lors d’une intervention, d’une enquête ou d’une action en prévention. Différentes données sont collectées (nom, prénom, sexe, profession, etc.), mais il existe aussi une zone de commentaires libres où des informations sensibles peuvent être indiquées comme celles relatives « à la prétendue origine raciale ou ethnique, aux opinions politiques, philosophiques ou religieuses, à l’appartenance syndicale, à la santé ou à la vie sexuelle ou l’orientation sexuelle ».

Un décret a autorisé le traitement des données à caractère personnel sur l’application de prise de notes de la gendarmerie, GendNotes. La Cnil a validé le texte en taclant au passage la politique de sécurité et de chiffrement du ministère de l’Intérieur.

L’application GendNotes disponible sur les smartphones et tablettes NeoGend est apte à traiter des données sensibles. (Crédit Photo : Ministère de l’Intérieur)

GendNotes, le bloc-notes 2.0 des gendarmes pourra comporter des données sensibles

  1. – Données et informations relatives aux personnes physiques :
    1° Le sexe ;
    2° Le nom de naissance et/ou d’usage ;
    3° Le prénom ;
    4° La date et le lieu de naissance ;
    5° Le pays de naissance ;
    6° La nationalité ;
    7° La profession ;
    8° La filiation : noms et prénoms du père et de la mère ;
    9° L’adresse et commune de résidence ;
    10° Les numéros de téléphone (fixe et portable) ;
    11° L’adresse électronique ;
    12° La photographie de la personne (le traitement ne comporte pas de dispositif de reconnaissance faciale à partir de l’image numérisée de la photographie) ;
    13° La géolocalisation de l’auteur de la note dans l’hypothèse où les paramètres de géolocalisation sont activés par ce dernier.
  2. – Données et informations générales relatives aux objets :
    1° La nature, la catégorie, le type, la marque ;
    2° Le numéro de série, l’immatriculation ou un autre numéro d’identification ;
    3° La nationalité ou le pays d’immatriculation ;
    4° La ou les photographies ;
    5° L’état civil du propriétaire ou du titulaire ;
    6° Les descriptifs et caractéristiques complémentaires, notamment la devise, la valeur faciale et l’organisme de délivrance.

– Données complémentaires relatives au message de placement en garde à vue à destination d’un magistrat :
1° L’unité d’enquête ;
2° L’identité de l’officier de police judiciaire responsable de la garde à vue ;
3° La date et le lieu du placement en garde à vue ;
4° Le cadre d’enquête (préliminaire, flagrance, commission rogatoire) ;
5° Le numéro de procédure ;
6° L’identité du magistrat informé ;
7° La liste des infractions ayant motivé la garde à vue ;
8° Les motifs du placement en garde à vue ;
9° La notification du droit relatif à la demande d’un avocat ;
10° Le barreau, l’identité, le numéro de téléphone et la date d’appel de l’avocat ;
11° La notification du droit relatif à la demande de médecin ;
12° La notification du droit relatif à l’information à la famille ainsi que l’identité, le lien de filiation, le numéro de téléphone et la date d’appel de la personne informée ;
13° La notification du droit relatif à l’information de l’employeur.

– Données complémentaires relatives aux infractions de police de la route à destination des magistrats du parquet :
1° La date de convocation ;
2° Les revenus de la personne mise en cause ;
3° Pour les infractions relatives :
a) Au permis de conduire : informations concernant le permis de conduire et informations concernant les éventuels arrêtés de suspension et/ou annulation du permis ;
b) A la conduite sans assurance : identité du propriétaire du véhicule si ce dernier n’est pas la personne concernée ;
c) A la conduite sous l’emprise d’un état alcoolique : taux d’alcoolémie et date de vérification de l’éthylomètre.

– Données et informations enregistrées dans les zones de commentaires libres :
Ne peuvent être enregistrées dans les zones de commentaires libres que les données et informations strictement nécessaires, adéquates et non excessives au regard des finalités poursuivies. Les données autres que celles mentionnées aux paragraphes I à IV de la présente annexe ne peuvent faire l’objet d’un pré-renseignement dans d’autres traitements.

Décret n° 2020-151 du 20 février 2020 portant autorisation d’un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « application mobile de prise de notes » (GendNotes)

NOR: INTD1928788D 
Version consolidée au 26 février 2020 

La Cnil tacle l’absence de chiffrement des données et des supports de stockage

Un encadrement validé par la Cnil qui a été saisie pour avis. Dans sa délibération, la commission indique avoir obtenu des garanties du ministère « à savoir que les informations enregistrées dans ces champs libres ne pourront pas alimenter d’autres traitements et qu’elles seront uniquement accessibles via l’application ». Plusieurs autres garanties ont été apportées comme la géolocalisation, la non-utilisation de la reconnaissance faciale sur les photos d’identité. Elle est rassurée aussi sur le fait que les données seront accessibles à des militaires de la gendarmerie, aux autorités judiciaires, mais aussi au préfet ou au maire de la commune concernée « dans la stricte limite où l’exercice de leurs compétences le rend nécessaire, sous réserve que le cadre dans lequel ces informations ont été collectées rende possible cette communication, et dans la stricte limite du besoin d’en connaître ».

La sécurité promue par le ministère de l’Intérieur n’est pas du goût de la Cnil. Sa politique de mot de passe n’est pas conforme, car « elle ne prévoit pas un verrouillage de l’accès au compte individuel après de multiples saisies erronées de mots de passe ». Par ailleurs, la fonction de verrouillage à distance des terminaux nécessite un accès à un réseau de communication et ne concerne pas les supports de stockage (carte SD par exemple). Enfin, la Cnil « regrette fortement que le ministère n’ait pas prévu des mesures de chiffrement des terminaux ainsi que des supports de stockage ». Pour elle, c’est « le seul moyen fiable de garantir la confidentialité des données stockées sur un équipement mobile en cas de perte ou de vol ».

Les gendarmes défendent leur nouvelle application Gendnotes

Avec Gendnotes, les gendarmes viennent-ils vraiment de lancer le coup d’envoi d’un “fichage ethnique, politique, sexuel, sanitaire et religieux” des Français? La parution ce samedi d’un décret autorisant la mise en oeuvre de l’application Gendnotes a été vivement commentée. Au point de forcer plusieurs gendarmes à intervenir dans le débat pour rassurer les internautes.

Au départ de cette polémique, les inquiétudes d’une maître de conférences en droit à la suite de la publication au Journal officiel du décret du 20 février 2020 autorisant le traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé “application mobile de prise de notes”, soit le fameux Gendnotes. “Ahurissant. Je n’avais pas vu pire fichier depuis Edvige”, un fichier de renseignement qui avait fait polémique, écrit sur Twitter cette spécialiste du droit.

Données personnelles

Un des huit articles du nouveau décret a en effet particulièrement alarmé la toile. Ce texte encadre la prise de note des gendarmes avec leur téléphone portable. Et, dans son article deux, il mentionne que les “opinions politiques, philosophiques ou religieuses, à l’appartenance syndicale, à la santé ou à la vie sexuelle ou l’orientation sexuelle” peuvent être saisies dans la zone des commentaires libres, une mention qui a effrayé nombre d’internautes.

Faut-il vraiment s’inquiéter d’une nouvelle menace pour les libertés publiques? Non, rassurent les gendarmes sur Twitter. Le projet Gendnotes est dans les cartons de la Mission numérique de la Gendarmerie depuis environ trois ans. L’Arme prévoit de remplacer avec cette application le bon vieux calepin à spirale. L’outil de prise de notes en mobilité doit intégrer le playstore de Neogend. Ce téléphone est le nouveau bureau mobile des gendarmes.

Le nouveau décret encadre la saisie et les données enregistrées dans l’application. Interconnectée avec le logiciel de rédaction des procédures des gendarmes, qu’elle pourra alimenter de manière automatisé, Gendnotes sera également en relation avec la messagerie tactique. Cette dernière permet d’interroger différents fichiers de police.

Pédagogique, l’ancien chef de la mission numérique Eric Freyssinet explique ainsi sur Twitter. “Dans les affaires ou les situations traitées, comme pour le logiciel de rédaction de procédure, des informations de nature sensible peuvent être traitées” par les gendarmes, détaille-t-il. Ce qui n’est pas nouveau en soit. Ces informations sensibles, autrefois noircies sur une feuille volante, pourraient désormais être enregistrées sur un support numérique.

Espace distinct

La déclaration du traitement intègre ainsi la possibilité de traiter d’informations sensibles. Cette possibilité est “uniquement mise en oeuvre quand c’est absolument nécessaire”, rappelle Eric Freyssinet, “dans un espace distinct non-associé à l’identité des personnes”, la zone des commentaires libres. Des données qui, a précisé la Place Beauvau à la Cnil, ne pourront “pas alimenter d’autres traitements et seront uniquement accessibles via l’application”. L’Intérieur prévoit également d’assortir ce champ libre d’une information aux utilisateurs expliquant la manière dont il convient de le renseigner.

Source : https://lessor.org – 24 février 2020

– « Gendnotes » : une mesure liberticide imposée discrètement par décret – https://www.facebook.com/Nantes.Revoltee/

1.La CNIL explique dans son avis du 3 octobre 2019 que Gendnotes « vise à dématérialiser la prise de notes […] en vue notamment d’alimenter de manière automatisée l’application métier « Logiciel de Rédaction des Procédures de la Gendarmerie Nationale » dénommée LRPGN ».
2.La CNIL explique dans son avis du 11 octobre 2012 que « les logiciels de rédaction des procédures de la police (LRPPN) et de la gendarmerie (LRPGN) alimentent, en début de procédure, le traitement d’antécédents TAJ ».

Depuis l’été 2015, NeoGend vise à équiper les gendarmes en tablettes et smartphones pour un gain de mobilité et d’efficacité dans leurs tâches quotidiennes. Dévoilé au Forum international de la cybersécurité (FIC), l’équipement remplacera, à terme, les Terminaux informatiques embarqués (TIE).

11/02/2016