Auchan, scandale de corruption en Russie

La filiale russe du distributeur français est au cœur d’un sombre affaire de corruption en Russie. Vendredi 6 mars, Auchan a indiqué ne pas avoir connaissance de faits récents.

Auchan au cœur d’un scandale en Russie. Après la publication d’un article de presse évoquant une affaire qui « menace la viabilité financière » de sa filiale, le distributeur français a admis avoir été confronté à de la corruption en Russie, mais affirme qu’elle « a été traitée ». Après la parution vendredi 6 mars d’un article des Echos, « je découvre ce matin que quelqu’un dit qu’il y a des mouvements de corruption en Russie. Je ne vais pas dire ‘non’, ‘oui’, je dis ‘ah bon ? ok’, on va avoir un ‘check’ particulier sur ce sujet-là, parce qu’à ma connaissance il n’y en avait plus », a déclaré Edgard Bonte, président d’Auchan Retail, à l’occasion de la publication des résultats annuels de la holding.

Selon le quotidien économique, qui publie une enquête de son correspondant à Moscou, la filiale russe d’Auchan « est secouée par un scandale de corruption » et « le juriste qui était chargé de faire le ménage a été écarté après avoir été brutalement attaqué ». Cet « avocat expert anti-corruption », Alexeï Jarkov, affirme avoir été « roué de coups de barre de fer à la tête » et « soupçonne l’un des cinq réseaux de corruption qu’il a découverts d’être derrière son agression », écrit le journal.

Après six semaines d’hôpital, l’avocat a appris en octobre le non-renouvellement de son contrat avec Auchan. Actuellement, il pense être mis sur la touche en raison de la découverte du «pot aux roses». François Rémy, alors directeur général d’Auchan Russie et à qui il rapportait le résultat de ses investigations, a été licencié.

«Entre 80 et 100 millions d’euros, soit de 2 à 3% du chiffre d’affaires réalisé en Russie, sont siphonnés chaque année grâce à cinq schémas de corruption, notamment aux marques propres, aux produits frais, aux fruits et légumes, mais aussi à la sécurité», a-t-il affirmé en se référant à des «dizaines de fournisseurs, certains prêts à témoigner».

«Des responsables d’achat organisent cette corruption via des appels d’offres pipés, des hausses artificielles de prix, des faveurs pour la promotion de produits et d’autres irrégularités au service qualité et au contrôle financier, notamment sur la compliance», raconte-t-il. Il cite, par exemple, le cas des produits à marque propre : «100 des 450 fournisseurs représentent 80% des ventes. Pour la moitié d’entre eux, il y a corruption»


Appels d’offres pipés

Et d’expliquer les mécanismes : « des responsables d’achat organisent cette corruption via des appels d’offres pipés, des hausses artificielles de prix, des faveurs pour la promotion de produits et d’autres irrégularités au service qualité et au contrôle financier, notamment sur la compliance », raconte le juriste. Il cite, par exemple, le cas des produits à marque propre : « 100 des 450 fournisseurs représentent 80 % des ventes. Pour la moitié d’entre eux, il y a corruption », assure Alexeï Jarkov.

Après avoir repéré que certains directeurs d’achat conservaient des fournisseurs pourtant chers, il a proposé de diversifier les sources d’approvisionnements afin d’introduire de la concurrence et de la transparence. Proposition rejetée. Depuis, les langues se délient parmi les managers mis sur la touche.

La Russie, vache à lait d’Auchan

« Dès mon arrivée, j’ai fait face à un système corrompu et une organisation criminelle que j’ai dû démanteler et dont je détiens encore les dossiers », vient d’écrire l’un d’eux à la direction en France dans une lettre dont « Les Echos » a vu une copie. Aucune poursuite judiciaire n’avait alors été initiée.

La crise est d’autant plus profonde que la Russie a, pendant longtemps, été la vache à lait d’Auchan . Aujourd’hui, la corruption menace la viabilité financière de cette filiale, déjà fragilisée par la chute des ventes. « Je suis sûr qu’à la tête de la famille Mulliez, d’autres seront prêts à m’écouter », veut croire l’avocat.


La réaction de la direction d’Auchan Retail

Contacté par « Les Echos » afin de réagir aux faits recueillis par notre correspondant à Moscou, Auchan Retail a répondu dans ces termes par la voix du secrétaire général d’Auchan Retail, Pierre Büchsenschutz : « Fin 2018, Edgard Bonte a été nommé président exécutif d’Auchan Retail. Très vite, la nouvelle direction du groupe a eu des alertes sur des suspicions fortes de corruption dans notre filiale russe. Elle a sensibilisé la direction d’Auchan Retail Russie d’alors à l’urgence de vérifier les faits en question et de prendre les mesures appropriées s’ils étaient avérés. Celle-ci a mis en place une équipe anti-corruption. A cette occasion, elle a notamment conclu un contrat à durée déterminée avec Alexei Jarkov pour mener une mission au sein de la direction produits.

La direction du groupe a parallèlement poursuivi un certain nombre d’investigations, lesquelles l’ont amené à constater que les nouvelles actions menées alors en Russie ne répondaient pas assez rapidement à ses attentes. Tout en étant conscient du challenge difficile que cette équipe avait à relever, il a donc été décidé en octobre 2019 de ne pas renouveler le contrat CDD de Monsieur Jarkov, d’engager le départ et le remplacement de plusieurs managers et de mettre fin aux fonctions du directeur général d’Auchan Retail Russie. Il s’agit d’une décision managériale qui n’a rien à voir avec d’éventuelles découvertes marquantes.

Oui, un certain nombre d’éléments nous laisse à penser qu’Auchan Retail pourrait être confronté en Russie à des systèmes de corruption. Mais nous n’avons pas, à ce stade, de preuves suffisantes qui nous permettraient d’attaquer en justice des personnes physiques. Sous la houlette de la nouvelle direction d’Auchan Retail Russie, une équipe interne de sécurité et de sûreté économique a été constituée pour continuer à investiguer tout fait de corruption dont aurait été victime Auchan.

Quant à l’agression dont a été victime Monsieur Jarkov en août dernier, la police russe qui enquête sur cette affaire n’a, à ce jour, aucun élément qui lui permette de faire un lien avec son activité pour Auchan ou avec toute autre de ses activités personnelles. »

https://www.lesechos.fr/industrie-services/conso-distribution/auchan-face-a-des-revelations-de-faits-de-corruption-en-russie-1182528

La holding du distributeur, en difficulté, a annoncé une perte nette annuelle de 1,286 milliard d’euros en 2019.

Une fois de plus, la famille Mulliez ne touchera pas cette année de dividende de son entreprise de distribution. Auchan Holding a une nouvelle fois accusé des pertes en 2019 : 1,286 milliard d’euros, après un déficit de 1,145 milliard un an plus tôt, selon les chiffres publiés vendredi 6 mars. Cette holding rassemble les activités de commerce (Auchan Retail), d’immobilier (Ceetrus) et de banque (Oney).

Par Cécile Prudhomme

Ces pertes ne proviennent pas de l’abandon, à la demande de l’Etat, du projet Europacity conduit par Ceetrus, même si l’entreprise y a laissé quelques milliers d’euros dans les études de faisabilité et est toujours titulaire de droits sur ce projet. Elles s’expliquent par des éléments exceptionnels, portant principalement sur son activité de distribution. La vente en 2019 des filiales d’Auchan en Italie et au Vietnam a nécessité de lourds investissements pour les remettre à flot avant de les céder. « Cela a beaucoup pesé sur nos comptes », a déclaré Edgard Bonte, président d’Auchan Retail.

Néanmoins, la rentabilité de l’activité de distribution d’Auchan s’est améliorée, et ce, dans tous les pays. Depuis que M. Bonte en a pris les rennes fin 2018, le groupe a abandonné 21 sites en France (10 ont été cédés et 11 fermés), réorganisé son siège, ce qui a conduit à la suppression de 517 postes…

Mais le chiffre d’affaires n’a pas suivi. Celui-ci a reculé de 1,4 % à changes courants à 45,8 milliards d’euros en 2019. La faute à deux pays. D’abord, la Russie, où l’activité a chuté de 5 % à magasins comparables. Un nouveau patron a été nommé pour redresser cette filiale, dont Auchan ne souhaite pas se séparer, d’après M. Bonte.

Augmenter le chiffre d’affaires devient vital

La France, qui pèse pour 38 % du chiffre d’affaires de l’entreprise, est l’autre responsable. Les ventes y ont reculé de 2 % en 2019. En France, M. Bonte ne perd pas espoir de « reconquérir les clients » partis vers une concurrence qui s’est plus vite remise en question et vers des circuits alternatifs (bio, magasins de producteurs…). Augmenter le chiffre d’affaires devient désormais vital pour ce colosse aux pieds d’argile. Auchan a de nombreuses cartes en mains, notamment avec ses 500 filières agricoles responsables qui seront 1 500 en 2022. Reste à les valoriser auprès des consommateurs.

Son projet stratégique, Auchan 2022, est censé mettre en avant une image de sélectionneur de produits sains et locaux. Dans ce cadre les magasins auront plus d’autonomie. Certains pourront nouer des accords avec des fournisseurs locaux –  jusqu’à 20 % de l’assortiment du magasin.

Des investissements seront consacrés à la rénovation du parc de magasins existants, mais il n’y aura pas de développement du réseau de magasins de proximité My Auchan. M. Bonte considère que le marché est déjà trop encombré. Place en revanche à la « proximité digitale », selon le dirigeant, c’est-à-dire, tout ce qui ne concerne pas les hypermarchés et les supermarchés. Objectif visé : passer cette catégorie de 7 % à 15 % du chiffre d’affaires en 2022. Avec un développement « des casiers de retraits, des drive piéton, des Auchan Minute [le magasin sans caissiers d’Auchan], des drive trucks où les consommateurs se font livrer les commandes passées au drive », a détaillé M. Bonte. Autant de petits modèles de commerce ou de fonctionnalités destinés à rajouter du chiffre d’affaires, 86 % étant encore réalisé par les hypermarchés.

16 déc. 2015

Association de Défense de la préservation du Cadre de Vie et des Commerçants-Artisans
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