On ne sait plus quoi faire du pétrole !

Le monde ne sait plus où stocker le pétrole

Prix de l’essence : vers 1 euro le litre… ou vers une remontée?

L’épidémie de coronavirus a plongé le monde dans une situation encore jamais vu. Les pays producteurs de pétrole font fasse à un tel effondrement de la demande qu’ils ne savent plus quoi faire de leur or noir. Une réunion de crise doit avoir lieu jeudi pour tenter de trouver un compromis et stopper la chute des cours.

« Etant donné l’énorme déséquilibre entre l’offre et la demande, on redoute sérieusement que le monde arrive à court de capacités de stockage », écrivent les analystes de l’Oxford Institute for Energy Studies.

Le prix à la pompe est donc au plus bas. Face à cette chute de la consommation, les producteurs ne savent plus où stocker les barils de pétrole ! CNN rapporte que selon des analystes de JBC Energy, six millions de barils pourraient être produits chaque jour… sans trouver de place.

Antoine Rostand, PDG de Kayrros, qui analyse le stockage du pétrole au quotidien avec des données satellites, a confié aux Echos que les capacités de stockage arrivent à saturation : seuls 600 millions de barils de pétrole peuvent trouver place, ce qui signifie que 90% des emplacements sont pleins ou réservés. « Au rythme actuel, nous estimons qu’il n’y aura plus de stockage disponible dans deux mois et demi, » a précisé Antoine Rostand.

Les oléoducs, les wagons-citernes et les navires pétroliers servent désormais de réservoir. Les Echos précisent que le prix de location des supertankers a été multiplié par cinq !

Pour trouver une solution, une réunion de l’OPEP (Organisation des pays exportateurs de pétrole) est prévue jeudi. La réduction de la production, et surtout de ses conséquences économiques, seront discutées. L’AFP évoque une baisse de production de 10 millions de barils par jour, ce que produisent la Russie ou l’Arabie Saoudite en un mois en temps normal. Les deux pays ne veulent pas être les seuls à faire des efforts et ils attendent un geste de Donald Trump, le Président américain, pour que les Etats-Unis réduisent aussi leur production. Les marchés sont optimistes puisque le prix du baril de brent est remonté à 32 dollars (29,50 euros).

Sources : Les EchosBFM BusinessEurope 1 et CNN Business

‘approvisonnement d’un “tanker” dans le terminal pétrolier de Port-Gentil, au Gabon
Photo : SCHAFF PHILIPPE – TOTAL

Avec l’effondrement de la demande de produits pétroliers, les capacités de stockage se remplissent à grande vitesse aux quatre coins de la planète, y compris sur les supertankers en mer. Le coût du stockage explose, accentuant la pression à la baisse sur les cours du brut.

Le pétrole brut est transporté soit par voie terrestre, via des oléoducs, soit plus généralement par voie maritime, à bord de tankers, un fret soumis à une stricte sécurité. Le stockage permet d’ajuster l’offre et la demande et de faire face à d’éventuelles crises internationales.

Le stockage du pétrole

Les pays industrialisés accumulent des réserves de pétrole et de gaz pour pouvoir ajuster en temps réel l’offre à la demande fluctuante des consommateurs. Le stockage des hydrocarbures permet aussi de se prémunir des crises internationales, ou encore de conserver le pétrole brut en attendant son raffinage.

Le pétrole brut fraîchement livré peut aussi être stocké pendant quelque temps non pas pour des raisons stratégiques, mais tout simplement parce qu’il est en attente de raffinage .

Les pays de l’UE doivent faire tous les mois un état de leurs stocks de pétrole

Suivant les pays, les centres de stockage de produits pétroliers sont gérés par des organismes d’Etat, des sociétés privées ou les deux à la fois. En France, des stocks régionaux sont constitués afin d’assurer une disponibilité de 10 jours de super, de 15 jours de fioul et de 15 jours de gazole . Il existe plus de 50 de ces centres où les produits pétroliers sont stockés dans des cuves de taille variable, parfois enterrées.


C’est un bras de fer planétaire qui s’engage jeudi : les plus grands pays producteurs de pétrole vont tenter de stopper la chute des cours de l’or noir qui a des conséquences inattendues.

Oui, l’effondrement de la demande est à la mesure de la mise à l’arrêt de l’économie. Jamais depuis que l’on a foré les premiers puits de pétrole au milieu du XIXe siècle – c’était à Titusville, en Pennsylvanie – le monde ne s’était trouvé face à un tel excédent d’or noir. Et du coup on ne sait plus quoi en faire ! On ne sait pas comment stocker tout ce brut qui sort des puits et que l’on ne peut pas arrêter. C’est inédit, comme beaucoup de choses dans cette crise causée par le Covid-19. A l’heure actuelle, 90% des capacités de stockage dans le monde sont saturées. Et les rares cuves ou entrepôts encore libres se louent des fortunes. 

Source : LA MATINALE D’EUROPE 1 – LE 6H – 9H30L’ÉDITO ÉCONOMIQUE

Les prix du sans-plomb et du gazole à la pompe poursuivent leur recul dans le contexte de crise lié au coronavirus. Quelles seront les évolutions à venir ?

A la pompe, la baisse des prix se poursuit cette semaine. Voici les dernières tendances relevées par le site spécialisé Carbu.com :

Prix du litre du lundi 06 avril 2020

  • Sans plomb 95 (E5) : 1,285 euro (soit – 1,8 centime en une semaine)
  • Gazole (B7) : 1,246 euro (soit – 1,3 centime cette semaine)

La semaine dernière, le sans-plomb perdait 3 centimes. Quant au gazole, il reculait de 1,4 centime. Si l’on se reporte au début du mois de janvier, avant le début de la propagation du coronavirus en Europe et du conflit commercial opposant la Russie à l’Arabie Saoudite, on obtient des chiffres très spectaculaires.

Depuis le 9 janvier 2020 :
SP 95 (E5) : – 27 centimes/litre
Gazole (B7) : – 26 centimes/litre

Le baril remonte

La valeur du baril de Brent, qui sert de référence internationale, est cependant repartie à la hausse à la fin de la semaine dernière. Après avoir connu son nadir lundi dernier à 22 dollars, le fût a repris de la valeur. Ce mercredi, la rencontre de l’offre et de la demande le fixe à 32 dollars. On est encore loin des niveaux du début d’année – autour de 70 dollars – mais ce rebond est notable.

On peut imputer cette remontée de la courbe à deux facteurs.

Premièrement, les investisseurs anticipent un redémarrage de l’économie mondiale dans les semaines à venir. La demande pourrait donc croître à nouveau, dans les limites autorisées par le déconfinement progressif des populations et la reprise partielle des activités industrielles.

Un jeudi crucial

Deuxièmement, la détente du climat entre les États-Unis, la Russie et l’Arabie Saoudite. Les principaux producteurs mondiaux (dont les membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole, l’Opepse sont mis d’accord pour se réunir jeudi et entamer des discussions. Objectif : fermer au moins provisoirement les robinets. Ces dernières semaines, Riyad et Moscou se livraient à une concurrence féroce faisant dégringoler les prix… et mettant en danger l’industrie pétrolière américaine. Celle-ci compte désormais largement sur les hydrocarbures non-conventionnels, très menacés lorsque les cours sont bas.

L’issue des pourparlers dits Opep+ – qui se tiendront en vidéo-conférence – conditionnera la tendance à venir. Car il y a urgence pour les producteurs et les intermédiaires. En cas d’échec, le cours pourrait passer sous la barre des 10 dollars, selon l’agence de notation Fitch. « S’il est peu probable que la capacité nominale de stockage soit dépassée, il est possible que l’ampleur même de l’offre excédentaire submerge les chaînes logistiques mondiales, plongeant le Brent dans des creux à un chiffre ». Les Echos titrent d’ailleurs à juste titre : « Le monde ne sait plus où stocker le pétrole« . Même les super-tankers servent désormais de dépôt, et jettent l’ancre au milieu de l’océan en attendant des jours meilleurs…

Une économie déprimée

Côté demande, rien n’est joué non plus. Les ventes de carburants ont reculé de 70 à 85 % en réaction au confinement généralisé dans l’Hexagone. Au-delà, la France est officiellement rentrée en récession ce mercredi, avec une baisse de 6 % du PIB au premier trimestre 2020. L’ensemble des économies occidentales devraient présenter des chiffres similaires dans les prochaines semaines. Un tel paysage de crise devrait favoriser un redressement seulement progressif et partiel de la demande de pétrole. L’économiste Carine Sebi estime ainsi que la consommation totale d’énergie de la France cette année pourrait reculer entre 2,3 et 7,6 %, en fonction de l’évolution du PIB et du temps total de confinement.

Et votre station-service dans tout ça ?

Ces grands mouvements mondialisés ont un impact direct sur le prix du litre à la pompe. Si les pays de l’Opep+ trouvent un accord ce jeudi, la chute sera sans doute ralentie, voire provisoirement jugulée. Si la réunion est un échec, la baisse se poursuivra. Attention cependant : un niveau inférieur à 1 euro reste très improbable, en raison du poids des taxes appliquées sur les carburants. Rappelons que les prélèvements constituent plus de 60 % du prix affiché sur les candélabres des stations.