Privatisation des routes nationales

Les routes nationales vont elles devenir payantes ?

Un document ci-dessus datant de 2014 et révélé par France Info fait état d’un projet de privatisation des dernières autoroutes encore sous le giron de l’Etat et à terme de tout ou partie du réseau routier national composé des voies express et routes nationales. Nombre d’entreprises privées se sont d’ores et déjà manifestées, affirmant être intéressées par une éventuelle reprise. De son côté la ministre des transports Elisabeth Borne, contrainte à la prudence dans un contexte de crise sociale approfondie, ne dément pas cette semaine chez JJ Bourdin. https://www.bfmtv.com/mediaplayer/video/elisabeth-borne-face-a-jean-jacques-bourdin-en-direct-1167509.html#

Treize ans après la privatisation du réseau autoroutier, -environ 9000 kilomètres sur 11 600 sont aujourd’hui gérés par des sociétés privés-, l’ASFA, l’association des sociétés françaises d’autoroutes, ne s’arrête pas là. Selon cette note interne, les 10 000 kilomètres de routes nationales françaises intéressent l’association. Datée du 17 avril 2014, cette note explique que »ce modèle vertueux [des concessions] pourrait s’élargir à l’ensemble du réseau routier national, dans sa configuration resserrée aux seuls grands itinéraires qui est devenue la sienne suite aux décentralisations ». « Il semble pertinent aujourd’hui de s’appuyer sur ce modèle pour continuer à développer et moderniser les infrastructures routières indispensables à la mobilité durable et au développement économique de notre pays, tout en contribuant de façon positive à la relance économique », explique ce document. « Cela peut – et même doit –  se faire sans peser sur les finances publiques, comme le permet les vertus de ce modèle ‘made in France’. Le transfert de tout ou partie du réseau routier national est de nature à provoquer un choc budgétaire très significatif, soulageant le budget de l’État et pérennisant les capacités d’entretien du réseau. »

Marianne le 12 juin – « Chassée par la porte, la privatisation des routes nationales revient par la fenêtre LREM« 

Des amendements LREM à la loi d’orientation des mobilités (LOM), actuellement discutée à l’Assemblée nationale, ouvrent la voie à la cession par l’Etat de portions de routes nationales contiguës aux autoroutes. Le début d’un nouveau juteux business pour Vinci, Eiffage & Co ?

N’est-il pas temps d’envisager la séparation de Vinci et de l’État ? De Vinci, mais aussi des autres groupes ayant nos autoroutes en concession via leur filiales, Eiffage et Abertis… Fin mars, la cellule investigation de Radio France publiait une longue enquête sur « l’histoire secrète » de la privatisation des autoroutes. Y était notamment révélée la convoitise des SCA (sociétés concessionnaires des autoroutes) pour le réseau non concédé, en particulier pour les routes nationales. Une note de l’Association des sociétés françaises d’autoroutes (ASFA), datée du 17 avril 2014, y était mise au jour. Intitulée sans ambiguïté « Le transfert du réseau routier national au secteur concédé », cette note affirmait que « le modèle vertueux des concessions pourrait s’élargir à l’ensemble du réseau routier national dans sa configuration resserrée aux seuls grands itinéraires », dans le but notamment de provoquer un « choc budgétaire soulageant le budget de l’État ». L’AFSA faisait également miroiter un effet immédiat sur la croissance économique, la pérennisation d’emplois non délocalisables, voire la création d’emplois nouveaux grâce aux investissements qui seraient entrepris.

L’affaire ne consisterait pas en une privatisation des nationales stricto sensu. Il s’agirait en fait d’un « adossement » de portions de RN aux concessions autoroutières. En gros, les SCA prendraient à leurs charge l’entretien de tronçons de routes nationales auxquels l’austérité budgétaire vaut d’être, pour certains, en très mauvais état. Elles les entretiendraient sans qu’aucun nouveau péage soit installé. Mais en échange, elles obtiendraient… une hausse des tarifs des péages autoroutiers – ce qui reviendrait à faire payer l’entretien des RN par les usagers des autoroutes – ou un allongement des durées de concession.

« PAS L’INTÉRÊT DES FRANÇAIS »

Le scénario d’une privatisation de certaines routes nationales poussé par les sociétés d’autoroutes

Les sociétés d’autoroutes s’intéressent au réseau routier national non concédé. La cellule investigation de Radio France s’est procuré une note interne de 2014 qui proposait de prendre en charge une partie de ce réseau sur les « grands itinéraires ». Avec comme objectif : transformer ces routes en autoroutes.

Treize ans après la privatisation, 2 600 kilomètres d’autoroutes n’ont pas encore été concédés au privé. Ces portions intéressent forcément le secteur autoroutier. « Il y a toujours eu la volonté de travailler sur des extensions de réseau, témoigne Lionel Leullier présent dans le secteur depuis plus de 15 ans. C’est ce qu’on appelait la politique des petits bouts. Avoir du réseau à gérer en plus, avec de petits morceaux de réseaux non concédés qui peuvent être adossés au réseau concédé, soit par une extension de la durée des concessions, soit par un péage complémentaire. »

Faute de crédit, l’état du réseau non concédé se dégrade. « Les responsables de sociétés d’autoroutes que j’ai rencontrés m’ont clairement dit qu’elles étaient intéressées par l’idée d’élargir le champ de leurs concessions (autoroutes ou transversales), confirme le sénateur centriste Hervey Maurey. Elles partent du constat qu’aujourd’hui l’état des voiries non concédées n’est pas satisfaisantDu coup, les sociétés d’autoroutes disent qu’elles veulent bien récupérer ces sections, en échange d’une prolongation de la durée des concessions.« 

« Ce qui nous intéresse, c’est de répondre au défi des nouvelles mobilités, explique le président de l’Association des sociétés françaises d’autoroutes (ASFA), Arnaud Hary. Nous proposons de moderniser l’accès aux grandes métropoles, d’aménager les sections des autoroutes non concédées, comme nous le faisons déjà pour les sections concédées, afin de les remettre à niveau. » 

Une note des sociétés d’autoroutes vantant un modèle « made in France »  

Mais la stratégie des sociétés d’autoroutes ne s’arrête pas là. Selon les informations de la cellule investigation de Radio France, les sociétés d’autoroutes ont également un œil sur le réseau routier national qui représente près de 10 000 kilomètres.

Une note interne de l’Association des sociétés françaises d’autoroutes (ASFA) datée du 17 avril 2014 que nous nous sommes procurée explique que « ce modèle vertueux [des concessions] pourrait s’élargir à l’ensemble du réseau routier national, dans sa configuration resserrée aux seuls grands itinéraires qui est devenue la sienne suite aux décentralisations ».

« Il semble pertinent aujourd’hui de s’appuyer sur ce modèle pour continuer à développer et moderniser les infrastructures routières indispensables à la mobilité durable et au développement économique de notre pays, tout en contribuant de façon positive à la relance économique », explique ce document. « Cela peut – et même doit –  se faire sans peser sur les finances publiques, comme le permet les vertus de ce modèle ‘made in France’. Le transfert de tout ou partie du réseau routier national est de nature à provoquer un choc budgétaire très significatif, soulageant le budget de l’État et pérennisant les capacités d’entretien du réseau. » 

DOCUMENT | Note de l’Association des sociétés française d’autoroutes sur « le transfert du réseau routier national au secteur concédé. »  

ASFA – Note sur le transfer… by on Scribd

Interrogé sur ce point, le président de l’Association des sociétés françaises d’autoroutes, Arnaud Hary, confirme que le réseau national intéresse le secteur, mais uniquement les portions qui pourraient à terme être transformées en autoroutes. « Chaque fois que l’État décidera d’aménager son réseau de routes nationales et de le transformer en autoroutes concédées, les sociétés d’autoroutes répondront présent, assure Arnaud Hary. Prenons l’exemple de la route Centre-Europe Atlantique (RCEA), entre Mâcon, Limoges et Poitiers : l’État a décidé de transformer 100 kilomètres de routes nationales en autoroutes. Les sociétés d’autoroutes répondent toujours à l’appel d’offres pour moderniser. »

« Un schéma préconisant la privatisation »  

Une réflexion est actuellement en cours sur le sujet. Le ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, et la ministre des Transports, Elisabeth Borne, ont mis en place un groupe de travail sur « l’évolution de la gestion » du réseau routier national non concédé. 

« Lorsque j’étais secrétaire d’État aux Transports, je voyais déjà arriver sur mon bureau des notes de la haute administration m’expliquant que le budget de l’État n’avait plus les moyens d’entretenir le réseau routier national, témoigne l’ancien élu socialiste, Alain Vidalies. Il y avait un schéma préconisant la privatisation. On me demandait de recommencer avec les routes nationales ce qu’on avait fait par le passé pour les autoroutes. »   

Contacté, la ministère des Transports dit rester « prudente » sur le sujet. Le rapport sur l’évolution de la gestion du réseau routier national non concédé devrait être rendu d’ici l’été 2019

Les routes nationales vont elles devenir payantes ?

Un document ci-dessus datant de 2014 et révélé par France Info fait état d’un projet de privatisation des dernières autoroutes encore sous le giron de l’Etat et à terme de tout ou partie du réseau routier national composé des voies express et routes nationales. Nombre d’entreprises privées se sont d’ores et déjà manifestées, affirmant être intéressées par une éventuelle reprise. De son côté la ministre des transports Elisabeth Borne, contrainte à la prudence dans un contexte de crise sociale approfondie, ne dément pas.

Aussi scandaleuse que puisse paraitre la nouvelle, elle n’a pourtant rien d’étonnant. La logique austéritaire appliquée par Macron et ses gouvernements répond à un objectif double poursuivi avec opiniâtreté : Le premier vise à assurer aux grands propriétaires de capitaux des débouchés nouveaux afin de soutenir activement leurs résultats financiers (alors même que le chômage de masse ne se résorbe pas ou très peu). Cette politique aboutit à un système de privatisation des bénéfices et de socialisation des coûts voire des pertes puisqu’en effet ne sont vendues que les filières et les parties rentables des propriétés publiques, la charge du reste échéant à l’Etat, donc aux contribuables. Plutôt que de réaffecter les bénéfices générés par les axes très empruntés à l’entretien et au développement des petites routes indispensables, ou à des moyens alternatifs de transport comme le train, la logique capitaliste entend offrir l’entièreté des profits potentiels sur un plateau d’argent au grand patronat. Le second objectif poursuivi par les libéraux partisans de l’austérité est de rassurer les marchés financiers qui prêtent aux Etats en abaissant par tous les moyens les déficits des comptes publics, peu importe les conséquences sociales de ces coupes. Pour ce faire, la privatisation apparait comme un excellent moyen, apportant à court terme une manne de liquidité et supprimant une partie des coûts alloués au fonctionnement des infrastructures et des entreprises.

L’intérêt commun n’est pas une marchandise ! 

Qu’on ne s’y trompe pas, une privatisation des routes nationales n’occasionnerait aucune baisse d’impôts, puisque le but affiché est d’abaisser le niveau du déficit. La situation sera alors celle d’une double imposition, une première par l’Etat et une seconde par le futur propriétaire privé. Vinci autoroutes réalise par exemple 1,1 milliard d’euros de profits nets en exploitant le réseau autoroutier, ce qui représente ni plus ni moins qu’un impôt prélevé sur les automobilistes puisque les redevances dépassent très largement les coûts et les investissements. Mais alors que l’on serait en droit d’attendre de l’Etat qu’il réaffecte de tels bénéfices dans des infrastructures utiles au plus grand nombre, Vinci autoroutes accapare ces richesses pour le seul profit de ses actionnaires. Pour imposer l’arrêt de ces politiques anti-sociales, il faut la force d’une mobilisation comme celle des gilets jaunes qui font trembler l’Elysée qui avance désormais caché. L’intérêt commun n’est pas une marchandise, nous devons imposer un service public de haut niveau partout, contre les logiques capitalistes délétères qui ruinent les travailleurs et la planète.

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