Privatisation du réseau routier national !?!

Le collectif de citoyens « État Kritic Mobilité » a manifesté dans le Finistère, le samedi 14 décembre, afin de dénoncer la possibilité de requalifier des routes en autoroutes et de les privatiser, avec la Loi d’Orientation des Mobilités. Une véritable inquiétude pour le collectif.

ADP, la FDJ, les retraites, et bientôt la SNCF et le réseau routier national,…
Décidément le gouvernement veut tout privatiser !

OUEST FRANCE – 15/12/19 – Distribution de tract et sensibilisation ce samedi après-midi à l’intersection de la RN 165 et de la RN 164. Une cinquantaines de personnes ont répondu à l’appel d’État Kritic mobilité, une émanation du mouvement des gilets jaunes. Ce mouvement citoyen souhaite alerter sur la loi d’Orientation et de Mobilité, dont deux amendements, visent à faciliter la privatisation de routes nationales au profits des concessions. Les autoroutes vont pouvoir comporter des sections à gabarit routier, c’est à dire que des routes pourraient être requalifiées en autoroutes. Un changement législatif qui commence à susciter de l’inquiètude dans le Finistère. 

Des élus de la majorité rassurants

Pour l’instant, 700 personnes ont déjà rejoint la page Facebook du collectif État Kritic, mais du côté des élus de la majorité, on se veut rassurant, selon eux, il ne peut pas y avoir de polémique. “Pour que la route nationale devienne autoroute, il faut qu’elle soit contigüe, c’est à dire dans le prolongement d’une autoroute. Dans le Finistère, dans les Côtes d’Armor, comme dans le Morbihan, c’est impossible, il n’y a pas d’autoroute donc on ne peut pas prolonger quelque chose qui n’existe pas ! assureDidier Le Gac Député LREM du Finistère et par ailleurs l’amendement précise que si jamais ça se faisait, ça ne peut se faire que sur un tronçon de 30 kilomètres” ajoute-t-il.

En 1969, le Général de Gaulle avait fait la promesse de la gratuité des routes en Bretagne50 ans plus tard, et après la mobilisation des Bonnets Rouges en 2013 contre l’Écotaxe, le sujet reste sensible

NON A LA PRIVATISATION DU RESEAU ROUTIER NATIONAL
BIENTÔT DES PÉAGES SUR NOS ROUTES !

avec Etat Kritic (Groupe Facebook) Compte Twitter ICI

La Loi d’Orientation des Mobilités a été votée le 19 novembre 2019 par l’Assemblée Nationale.
L’article 161 de cette loi modifie les articles 122-1 et 122-4 du code de la voirie routière et permet de ce fait de requalifier des routes en autoroutes par simple décret donc sans aucun vote ! Et quand on sait que l’État a annoncé la fin des autoroutes gratuites, le tableau est clair : les péages vont débarquer!
Ce même article permet également de soumettre à péage les grands ouvrages d’art (ponts et les tunnels) afin d’en assurer les financements d’entretien, et ce sur TOUS les types de voiries (de la route nationale à la route communale).
La Directive européenne Euro-Redevance adoptée le 25 octobre 2018 encourage les états membres à étendre leur réseau routier soumis à péage afin de faire payer au plus grand nombre des usagers de la route la pollution qu’ils génèrent, sur le principe « pollueur-payeur ».
Le principe ? Modifier le calcul du montant des péages afin que les automobilistes, routiers ou motards ne payent plus simplement en fonction du nombre de kilomètres de routes qu’ils empruntent mais également en fonction du taux d’émission de CO2 de leur véhicule.
Date de mise en œuvre de cette Directive : 2021 pour les camions et 2026 pour les autres véhicules !
Les députés bretons ont voté OUI en masse pour la Loi d’Orientation des Mobilités et son article 161.
La commission européenne chargée de faire respecter la Directive Euro-Redevance a pointer comme exemple à ne plus reproduire le recul de la France et de la taxe carbone face aux bonnets rouges bretons, textuellement ! Demandons des comptes !!! Ne nous laissons pas faire !!!

SIGNEZ LA PÉTITION “NON A LA PRIVATISATION DU RESEAU ROUTIER NATIONAL”

Gratuité des routes bretonnes :
la brèche juridique qui inquiète

Le Télégramme 12-12-2019

Les routes nationales en Bretagne vont-elles demeurer gratuites ? Pas sûr, selon un groupe de citoyens qui s’appuie sur deux récents amendements.

Le 19 novembre, le parlement a définitivement adopté la Loi d’orientation des mobilités. Deux articles de cette loi dite « LOM » visent à modifier le code de la voirie routière. Il est ainsi stipulé que les autoroutes pourront « comporter des sections à gabarit routier (2×1 voie, limitée à 80 km), dans des conditions définies par décret en Conseil d’État, tenant compte notamment de contraintes topographiques ». La notion d’autoroute pourrait donc s’étendre au-delà des 2X2 voies classiques. Une privatisation des routes nationales qui serait néanmoins limitée à des portions de quelques dizaines de kilomètres.

Au printemps dernier, la cellule d’investigation de Radio France avait d’ailleurs révélé que les sociétés d’autoroutes avaient informé le gouvernement qu’elles étaient prêtes à reprendre la gestion de tout ou partie du réseau routier national.

Une information que le ministère des Transports n’avait pas démentie.

Un groupe de citoyens monte au créneau

« Aujourd’hui, donc, la loi permet de requalifier des routes en autoroutes par simple décret, sans aucun vote. À partir de là, il ne reste plus qu’à poser les péages », s’indigne le groupe de citoyens baptisé « État Kritic Mobilités ». Et la Brestoise Virginie, l’une des responsables de ce groupe composé essentiellement d’anciens gilets jaunes, d’imaginer un scénario des plus pessimistes : « Si un tunnel ou un pont doit subir des travaux et que les collectivités ne peuvent financer le chantier, les ouvrages pourront être cédés à des sociétés autoroutières et il faudra payer pour emprunter comme celui de Morlaix (29), de Saint-Brieuc ».

Une chose est certaine : en mai 2018, Elisabeth Borne, actuelle ministre de la Transition écologique et solidaire, avait elle-même estimé que l’investissement nécessaire devait être de l’ordre du milliard d’euros annuel lors de l’annonce devant le Sénat du lancement d’un « plan de sauvegarde des routes nationales ». Trois mois plus tard, Benjamin Grivaux, porte-parole du gouvernement, avait annoncé que le gouvernement portait à 850 millions d’euros le budget alloué à l’entretien des routes, de 2020 à 2022, et à 930 millions à partir de 2023,.

Députés bretons LREM : « Pas de privatisation des routes en Bretagne »

Ouest France – Publié le 14/12/2019

Inquiet que des sociétés d’autoroutes puissent gérer certaines routes nationales, depuis le vote de la loi Mobilité, en novembre 2019, le groupe État Kritik organisait une opération escargot, à Châteaulin, samedi 14 décembre 2019. Il n’y aura « pas de privatisation des routes en Bretagne », affirment les députés bretons LREM.

Le groupe État Kritik organisait une opération escargot, ce samedi après-midi 14 décembre 2019, à Châteaulin. « Nous, citoyens français, citoyens de Bretagne, demandons des explications et un discours clair quant à l’avenir des routes de ce pays et tout particulièrement des routes bretonnes, dont la gratuité historique est chère au cœur de ses habitants », expliquait le groupe dans un communiqué. Leur inquiétude vient de la loi d’Orientation des mobilités, adoptée le 18 novembre 2019, dans laquelle des amendements permettent à des sociétés d’autoroutes de gérer certaines routes nationales, sous conditions.

Les députés LREM bretons ont précisé, samedi 14 décembre 2019, dans un communiqué, qu’il n’y aurait « pas de privatisation des routes en Bretagne »et que le groupe État Kritik «s’alarme à tort».

Ils précisent que cet amendement concerne les routes« ayant pour effet de fluidifier l’accès au réseau autoroutier. La proximité de Morlaix ou Brest d’une autoroute n’est pas tout à fait avérée ! »Autre situation concernée : une route nationale à 2×1 voies et limitée à 80 km/h peut désormais être considérée comme une autoroute, «dès lors que les conditions économiques, environnementales ou géomorphologiques le justifieront. […] Tel est déjà le cas dans les zones de montagne de tous les pays d’Europe. […] La situation montagnarde de la Bretagne n’est pas tout à fait avérée non plus ! »

France 3 Bretagne diffusé le 15 octobre 2018

La privatisation des routes, une idée à l’encontre du modèle social français

Par Eric Vernier et L’Hocine Houanti  |  22/07/2019,

Des gilets jaunes bloquant les axes de circulation en novembre 2018. (Crédits : Reuters)

IDEE. Privatiser les routes nationales et installer des péages : la mesure rompt brutalement avec la conception du contrat social rousseauiste aux fondements de la France moderne. Par Eric Vernier, Université de Lille et L’Hocine Houanti, Excelia Group – UGEI

Les vacances approchent et vous vous apprêtez, comme de nombreux Français, à prendre la route. Et, qui sait, peut-être allez-vous vous-même emprunter les nationales pour éviter le coût trop élevé des péages ? Sauf que votre tactique risque de devenir inutile dans les mois à venir. En effet, les nationales pourraient bien être à leur tour, privatisées.

Ainsi d’après La Lettre A du 5 juin 2019

« des amendements au texte de loi d’orientation des mobilités, actuellement examiné à l’Assemblée nationale, vont autoriser l’État à faire entrer des dizaines de kilomètres de routes nationales dans le régime concessif, à la grande satisfaction des groupes autoroutiers ».

Une idée fait donc son chemin depuis au moins 2015, portée par les sociétés d’autoroutes et reprise depuis par des députés LREM et le gouvernement : privatiser les routes nationales et installer des péages.

Ce projet est notamment relayé dans les médias et au niveau politique par l’Institut européen de recherche militant pour la liberté économique et la concurrence fiscale (IREF), un think tank français. Or, plusieurs écueils apparaissent, mettant en avant des contradictions inhérentes à la construction sociale même de la France.

La construction du modèle français

Sur un plan politique, la France s’est construite au lendemain de la Seconde Guerre mondiale à partir du programme du Conseil national de la résistance (CNR), sur une philosophie remarquable : la démocratie globale, c’est-à-dire politique, mais aussi économique et sociale.

Dans cet esprit, les routes sont là pour relier les hommes entre eux, afin de faciliter l’élévation culturelle, intellectuelle et sociale en permettant à tous de se déplacer facilement, librement et gratuitement vers les centres de pouvoir, les musées, les lycées ou les hôpitaux. C’est l’essence même du contrat social rousseauiste. Ainsi, l’impôt devient dès lors la contribution de chacun, en fonction de ses capacités financières, au bien commun dont il peut user à sa guise. Or, faire payer les routes en fonction de son usage revient à faire payer à tout le monde la même chose quel que soit son revenu.

Rémunérer tout service rendu

Les défenseurs de la privatisation des routes incluent le député Joël Giraud (LREM) à l’initiative des amendements révélés début juin, l’IREF et l’Association des sociétés françaises d’autoroutes (ASFA). Tous partent de l’hypothèse qu’il ne faut payer que ce que l’on utilise, qu’il faut rémunérer tout service rendu, proposition moquée par l’ingénieur et consultant Jean‑Claude Jancovici.

Ferghane Azihari, chargé d’études à l’IREF et « entrepreneur intellectuel libertarien » (sic), défend le principe de l’usager-payeur :

« Cette pratique courante à travers le monde a de nombreux avantages. En liant le financement des infrastructures à leur utilisation, elle réduit les incitations des pouvoirs publics et des concessionnaires au gaspillage. »

Cela reviendrait donc à ne payer l’école que si on a des enfants, et ce uniquement durant la période scolaire et jusqu’à la sortie du parcours d’études. Ce devrait être alors aussi, comme certains le soulignaient avec un raisonnement par l’absurde, faire payer le trottoir aux piétons. Jacques Attali allait jusqu’à ironiser que « celui qui n’est pas malade ne devrait pas payer les hôpitaux ».

Par ailleurs, quand on se fait livrer parce que l’on ne possède pas de voiture, le client ne paiera pas le péage directement. C’est le livreur qui réglera, le coût se répercutant donc sur le prix de la marchandise livrée, avec une incidence additive sur la TVA… Ce sera donc le consommateur le payeur final, et non l’usager de la route. Soit une contradiction évidente avec le sens affiché du projet.

Un argumentaire en faveur des privatisations

Deux théories principales sont mobilisées pour analyser la privatisation : les théories néo-institutionnelles des organisations et l’économie institutionnelle de la réglementation. Elles développent un argumentaire en faveur des privatisations construites sur deux idées complémentaires.

La gouvernance classique notamment par le contrôle par le marché des capitaux ou encore la menace de liquidation faisant défaut aux entreprises publiques.

Dans le même sens, la théorie de l’agence stipule que l’actionnariat privé dispose de plus d’outils de contrôle de la gouvernance que l’actionnariat public qui n’est pas engagé financièrement.

L’efficacité des politiques de privatisation reste mitigée.

Certes, certains auteurs ont démontré une amélioration de la performance des entreprises à la suite de leur privatisation comme au Mexique ou sur l’emploi.

Cependant, des chercheurs, comme Joel T. Harper qui a travaillé sur des entreprises tchèques en 2001, ont pu conclure que l’amélioration des résultats est plus expliquée par le secteur d’activité et le degré de concurrence que le changement du statut de l’entreprise.

Des échecs cinglants ailleurs

L’expérience des pays africains, notamment avec les fameux plans d’ajustement structurel, est très parlante. Les conséquences socio-économiques sont importantes et se traduisent par des fermetures d’entreprises et des licenciements massifs mettant des familles entières sans revenu de survie. Dans le cas algérien, entre 1994 et 1998, 1 010 entreprises publiques ont dû fermer et plus de 500 000 emplois ont été supprimés.