La Poste « flic » ses clients et s’associe avec une assurance

Il est désormais impossible de faire des dépôts de centaines ou milliers d’euros en liquide sans explication à la Banque postale. Il sera demandé aux clients de justifier la provenance des fonds, afin de lutter contre le blanchiment et la fraude.

La Poste a durci les modalités des versements en liquide effectués au guichet sur les comptes courants postaux et les livrets A.

Voici encore une fois la preuve de la mascarade politique qui consiste à faire croire que le contrôle des dépôts de sommes d’argent en espèces, ridiculement basses, dans les banques pourrait permettre de lutter contre le terrorisme ou le blanchiment d’argent. En réalité tout ceci n’a strictement rien à voir avec la sécurité mais bien avec le contrôle. Effectivement, les 100 milliards d’euros qui évitent le Trésor public chaque année vont passer par des paradis fiscaux qui ne s’encombrent pas de ce genre de limitations. 

La Banque Postale exige depuis le 24 février de ses clients de prouver l’origine des fonds qu’ils déposent en espèces. 

L’établissement bancaire de la Poste entend lutter contre le blanchiment d’argent.

Des euros, oui, mais avec des preuves. La Banque Postale a décidé d’encadrer plus strictement les dépôts de liquidités de ses 10,3 millions de clients depuis ce lundi. Objectif : lutter contre le blanchiment d’argent et l’argent sale provenant des trafics de drogue ou des vols.

Pour tout versement d’espèces inférieur ou égal à 1500 euros cumulés sur trente jours, il faut désormais effectuer une « déclaration de l’origine des fonds ». Jusqu’à présent, seule une pièce d’identité était nécessaire pour déposer de l’argent sur son compte bancaire.

Entre 1501 et 10 000 euros déposés sur trente jours, la Banque Postale réclame désormais un justificatif de l’origine des fonds. Le client devra fournir à son banquier une facture ou une lettre de notaire en cas de succession par exemple pour prouver la provenance des espèces. Au-delà de 10 000 euros sur trente jours, les versements ne sont carrément plus autorisés.

Autre changement décidé par la Banque Postale : les versements en espèces d’un montant supérieur à 1500 euros ne pourront plus être effectués par un mandataire. Seul le titulaire du compte ou son représentant légal peut maintenant effectuer cette opération. La somme devra en outre être déposée au bureau de poste où le compte est domicilié, pas dans n’importe quel bureau de poste. …


Déposer du liquide sur son compte à la Banque postale sans aucune explication n’est plus possible. Les dix millions de clients français devront désormais expliquer la provenance de l’argent déposé. Depuis le lundi 24 février, la pièce d’identité ne suffit plus. Un client, présent sur place, s’exprime : « On arrive à vous quadriller votre vie, votre situation, le compte. Je trouve que c’est un peu du flicage, une atteinte à la liberté. »


« Ces nouveaux seuils nous permettent de mieux maîtriser les risques de fraude et de renforcer notre lutte », souligne-t-on à la Banque postale, précisant que les nouvelles conventions de compte vont être prochainement envoyées aux clients. Autrement dit, il s’agit pour la Banque Postale de mieux lutter contre les dépôts récurrents de liquidités liés aux trafics (drogue, vol…) dans certaines zones sensibles. La réglementation, très stricte, vient encore d’être renforcée par une ordonnance publiée au Journal officiel.

Le Code monétaire et financier oblige les banques à « une vigilance constante » et à pratiquer « un examen attentif des opérations effectuées en veillant à ce qu’elles soient cohérentes avec la connaissance actualisée » qu’elles ont de leurs clients. En clair, il en va de leur responsabilité de s’informer de l’origine de toute somme en liquide déposée qui leur paraîtrait suspecte. Et la Banque Postale en sait quelque chose.

Son appel devant le Conseil d’Etat contre une sanction infligée par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) a été rejeté l’an dernier. Résultat, la Banque postale s’est vue infliger une amende record de 50 millions d’eurospour avoir manqué à son obligation de vigilance dans une sombre affaire de transferts par mandats cash au profit de personnes aux avoirs gelés.

1,3 million de clients aux guichets chaque jour

Cet épisode a marqué amèrement les esprits à la Banque Postale, qui aime à rappeler son rôle social. Parmi ses clients, 1,5 million de personnes ont eu, dans le passé, des difficultés pour accéder à un compte en banque et 1,6 million sont considérés comme fragiles. Le réseau revendique être l’un des derniers à permettre les dépôts d’espèces aux guichets. Au-delà de la lutte contre le blanchiment, la Banque postale pourrait vouloir « inciter les particuliers à déposer leur cash à l’automate », croit savoir un agent rencontré lundi. Et ainsi limiter l’affluence en agence : 1, 3 million de personnes pousse chaque jour la porte d’un bureau de poste en France.

Le mariage entre La Banque Postale et CNP

La Banque Postale, filiale bancaire du groupe La Poste, a réalisé un exercice 2019 solide, avec bénéfice net et revenus en hausse, avant son changement de dimension grâce au rapprochement imminent avec CNP Assurances.

L’union entre La Banque Postale et CNP Assurances sera officiellement scellée ce mercredi 4 mars.

Par Romain Gueugneau Publié le 2 mars 2020 

Un nouveau bancassureur français est né. En fin de semaine dernière, La Poste a obtenu auprès de l’Autorité de la concurrence russe le feu vert pour marier La Banque Postale et CNP Assurances. C’était la dernière autorisation qui manquait pour officialiser le rapprochement. La Russie avait en effet son mot à dire, car La Poste est présente dans le pays via sa filiale de livraison de colis DPD. Et  le mariage entre les deux groupes fait évoluer le capital de La Poste, désormais contrôlée par la Caisse des dépôts.

Le Président du Directoire de la Banque Postale, Remy Weber, pose lors d’une séance photo au siège de la Banque Postale à Paris le 7 septembre 2018. (Photo de JOEL SAGET / AFP)

La signature officielle interviendra ce mercredi, avec un conseil d’administration de CNP Assurances à l’issue duquel La Banque Postale deviendra l’actionnaire majoritaire, avec 62,13 % du capital. « C’est un moment historique pour le groupe, l’aboutissement de tout un projet », a commenté lundi le président du directoire Rémy Weber, à l’occasion de la présentation des résultats annuels.

Le nouveau groupe affichera un bilan de 708 milliards d’euros, pour un chiffre d’affaires pro forma de 9,2 milliards d’euros, composé à 57 % des activités bancaires et 41 % de l’assurance (le solde est représenté par la gestion d’actifs). Il s’installera dans le top 15 des bancassureurs en Europe. 

La production de crédits immobiliers en hausse de 20%

Tout comme CNP Assurances , La Banque Postale présente des résultats plutôt solides avant son mariage, malgré un environnement difficile marqué par les taux bas. En 2019, le produit net bancaire a grimpé de 1,4 %, à 5,65 milliards d’euros, tiré par la dynamique commerciale dans la banque de détail.

Les encours de crédits aux particuliers ont augmenté de 5,5 %, à 68,9 milliards, portés par un bond de 20 % de la production de crédits immobiliers sur la période, à 12,4 milliards d’euros, dans un contexte de marché très favorable aux emprunteurs. La banque se rapproche ainsi de son record de 2017, quand le volume de nouveaux prêts avait atteint 13,5 milliards (+ 21 %). 

Les encours de crédits aux entreprises et aux collectivités locales ont, quant à eux, flambé de 23 % l’an dernier. « Le segment des PME reste un axe de conquête prioritaire », rappelle Rémy Weber.  Le rachat de l’activité de banque de détail d’HSBC France pourrait justement permettre au groupe de se renforcer sur ce marché, outre l’apport également bienvenu en termes de clientèle patrimoniale.

« Nous avons confirmé notre intérêt pour ce dossier. Mais le périmètre proposé n’est pas forcément satisfaisant pour nous », commente Rémy Weber. Aux dernières nouvelles, les PME et ETI ne faisaient effectivement pas partie des activités en vente, limitées pour l’instant à la clientèle de particuliers et des plus petites entreprises. « Dans les opérations de cessions d’actifs, le plus compliqué, c’est toujours de savoir de quel périmètre précis on parle », glisse le patron de La Banque Postale.

Une structure financière renforcée

Malgré des frais de gestion en hausse, en partie à cause des charges d’accompagnement liées à l’opération CNP, le résultat avant impôt progresse de 1,9 % pour s’élever à 1,06 milliard d’euros. Le coefficient d’exploitation reste néanmoins élevé, à 83,8 %.

La structure financière ressort renforcée, avec un ratio de fonds propres de 12,2 % (contre 11,7 % en 2018), dans la moyenne des grands groupes bancaires européens. De quoi aborder l’année 2020 sereinement, dans un secteur qui doit désormais se préparer à la tempête économique que pourrait occasionner le coronavirus.

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