Sites Seveso : 139 000 usagers du RER D en danger

Les sites Antargaz et la Compagnie Industrielle Maritime (CIM) sont présents sur les deux communes depuis les années 1960. Les élus réclament leur déménagement.

Les deux sites Seveso bordent la voie de chemin de fer, où circule la ligne D du RER, mais aussi la nationale où sont implantés de nombreux magasins et centres commerciaux… Sans compter la présence à proximité des sites, de la Seine, de la forêt de Sénart et des lacs de Grigny, un site Natura 2000.

Essonne. Le Conseil d’Etat devra se prononcer sur les sites Seveso de Grigny et Ris-Orangis

Une étape a été franchie à propos des entreprises classées Seveso de Grigny et Ris-Orangis. Le tribunal administratif a renvoyé le dossier devant le Conseil d’Etat.

Par : Jérôme Lemonnie – actu.fr – le 2 mars 2020

« On a gagné une bataille, mais on n’a pas encore gagné la guerre ». Par ces mots, Me Guillaume Ghaye se réjouit du jugement délivré par le tribunal administratif de Versailles concernant les deux installations classées Seveso, à savoir Antargaz et la Compagnie Industrielle Maritime (CIM), présentes sur les communes de Grigny et de Ris-Orangis.

Depuis plusieurs mois – même plusieurs années – les deux communes, auxquelles s’est jointe la communauté d’agglomération Grand Paris sud, veulent que ces entreprises quittent le territoire.

Lire aussi : Essonne. Classées Seveso, des entreprises sont dans le collimateur de Ris-Orangis et Grigny

Ris-Orangis, septembre 2017. À la Compagnie Industrielle Maritime (CIM), dont la superficie est de 8,5 ha, 1,4 million de mètres cubes d’hydrocarbures sont envoyés par camions et par rail chaque année. LP/F.G.

«On risque la vie des 139 000 usagers du RER D»

Comme justifications, les maires estiment que ces lieux présentent des risques sur le volet environnemental ainsi que sur celui concernant la protection des populations. 

« La ligne du RER D passe à quelques mètres de ce site. Elle le surplombe même. En cas de problème sur place, on risque la vie des 139 000 passagers qui empruntent le tronçon chaque jour », lançait il y a peu Philippe Rio, le maire de Grigny.

Plus précisément, les élus dénoncent l’utilisation de la loi du 8 novembre 2019 par le préfet de l’Essonne. Un usage qui aurait justifié l’absence d’évaluation environnementale dans ce dossier classé Plan de prévention des risques technologiques (PPRT). « Elle est pourtant obligatoire », avançait le maire de Grigny, interrogé il y a quelques semaines.

Lire aussi : Essonne. Une pétition naît pour voir les entreprises classées Seveso quitter Ris-Orangis et Grigny

Une procédure encore longue

Ce lundi 2 février, le tribunal administratif de Versailles a donc rendu son jugement. « Les juges ont décidé de renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité déposée par les collectivités devant le Conseil d’Etat« , présente l’avocat des différentes collectivité.

Il s’agit donc d’un premier pas pour les collectivités. Mais la bataille promet encore d’être longue. « Il faut entre 6 et 8 mois au Conseil d’Etat pour statuer sur ce dossier. Ensuite, s’il estime qu’il y a une effectivement un problème à ce sujet, il renvoie le dossier au Conseil constitutionnel qui prendra entre 2 et 4 mois supplémentaires pour se prononcer », complète Me Ghaye.

Bref, si la procédure aboutie, le jugement ne sera sans doute pas connu avant fin 2020, voire début 2021.

Vous voyez ce sont les immeubles de « Grigny 2 » : 5 000 logements à proximité de ce site. En cas d’accident ou d’acte de malveillance, ce sont 10 000 habitants qui sont impactés ! Il y a aussi une ligne de chemin de fer qui passe en bordure du site. Et la Seine qui coule vers Paris. Le risque est très important pour la santé et l’environnement et on ne peut plus nous dire que ce genre de catastrophe ne peut pas arriver. 

le combat de Ris-Orangis et Grigny contre les sites Seveso se poursuit en justice

Par Nolwenn Cosson – Le 1 mars 2020

C’est une étape importante pour Philippe Rio (PCF) et Stéphane Raffalli (PS), respectivement maire de Grigny et de Ris-Orangis. Ce lundi, le tribunal administratif de Versailles rend son jugement sur leur question prioritaire de constitutionnalité portant sur les deux installations classées Seveso 2 Seuil Haut – Antargaz et la Compagnie Industrielle Maritime (CIM) – présentes sur leurs territoires. Ils avaient renouvelé leur demande de déménagement de ces deux sites après l’incendie de l’usine Lubrizol de Rouen (Seine-Maritime).

Les élus dénoncent l’utilisation par le préfet de l’Essonne de la loi de novembre 2019 relative à l’énergie et au climat pour mettre fin à leur recours en annulation du Plan de prévention des risques technologiques (PPRT). Initié en 2009 et approuvé en 2018 par l’Etat, il vise à protéger les vies humaines en cas d’accident grâce à la mise en place de mesures préventives. Objectif non rempli selon les deux maires, qui réclament le déménagement des sites.

« Le préfet de l’Essonne s’appuie sur cette loi pour justifier l’absence d’évaluation environnementale dans ce plan. Elle est pourtant obligatoire depuis 2001, dénonce Philippe Rio. Mais l’Etat ne peut pas être juge et partie. Si on ne fait rien, cette décision pourrait avoir une incidence sur l’issue de notre recours. »

« Ce serait un motif sérieux d’annulation du PPRT. »

À quelques heures de la réponse, Stéphane Rafalli se dit confiant. « Nous devrions obtenir une décision favorable. Les conclusions du rapporteur public sont suivies à 95 %. Il a proposé au tribunal de renvoyer notre QPC au Conseil d’Etat, seul apte à la transférer au conseil constitutionnel. Ce dernier pourra vérifier si l’utilisation de cette loi relative à l’énergie et au climat est bien respectueuse des droits de l’Homme. L’Etat ne peut pas s’exonérer des contrôles environnementaux. Ce serait un motif sérieux d’annulation du PPRT. »

Et pourrait donc, à terme, leur donner gain de cause : obtenir le déménagement des deux sites installés depuis 1960 sur leur territoire. « Ce plan prévoit des travaux mais ne prend pas en compte le risque létal encouru par la population, notamment les 143 000 passagers qui utilisent chaque jour le RER D », s’inquiète Philippe Rio.

Le dépôt de gaz liquéfiés d’Antargaz à Ris-Orangis, qui s’étend sur 3,6 ha se trouve en bordure des voies du RER D, mais aussi de la Seine et de la N 7. Il est le plus important site de stockage de gaz d’Ile-de-France. Sur celui de son voisin, le dépôt d’hydrocarbures 8,5 ha de la CIM basé à Grigny, 1,4 million de mètres cubes d’hydrocarbures y sont envoyés par camions et par rail chaque année.

Grigny, avril 2015. Un exercice Seveso avait été organisé sur le site d’Antargaz en 2015./LP
Grigny, avril 2015. Un exercice Seveso avait été organisé sur le site d’Antargaz en 2015./LP  

Un exercice de sécurité organisé en octobre 2018

Pourtant, aucune association d’usagers du RER D ne s’est saisie de la question. « Ce n’est pas un sujet développé dans nos actions, mais à titre personnel je trouve qu’il n’est jamais souhaitable d’être exposé à un tel risque », estime Siegfried Van Waerbeke, le président de l’association D- Très insuffisant.

De son côté, la préfecture rappelle que « ces plans sont testés régulièrement et mis à jour ». Le dernier exercice concernant les deux établissements date d’octobre 2018. « Ces PPRT sont établis sur la base des scénarios d’accident expertisés par la Direction régionale et interdépartementale de l’environnement et de l’énergie (DRIEE), poursuit la préfecture. C’est grâce à ce travail d’analyse que l’on sait que certains phénomènes peuvent se produire. Mais il est trompeur d’évoquer ces situations sans faire état des nombreuses mesures techniques mises en place pour empêcher que cela ne se produise. »

Comments are closed, but trackbacks and pingbacks are open.