NestlĂ© est une multinationale suisse et l’un des principaux acteurs de l’industrie agroalimentaire de la planĂšte. Avec un chiffre dâaffaires de CHF 89,8 milliards en 2016, elle est la premiĂšre entreprise agroalimentaire du monde et la plus grande entreprise laitiĂšre du monde. Elle transforme et commercialise un large Ă©ventail de produits et de boissons pour l’alimentationhumaine et animale. Elle se veut l’un des principaux innovateurs en la matiĂšre en Europe, avec notamment le cafĂ© soluble NescafĂ©, les plats lyophilisĂ©s Bolino ou les surgelĂ©s. Son siĂšge social est situĂ© Ă Vevey, en Suisse.
Mercredi 28 mai 2019 La Vigie de l’Eau a organisĂ© une confĂ©rence sur l’Eau et l’alimentation Ă ContrexĂ©ville. Deux thĂ©matiques chĂšres Ă NestlĂ©. Le Collectif Eau 88, aidĂ© par Leauquimord.com a organisĂ© une manifestation symbolique Ă l’entrĂ©e de cette confĂ©rence pour informer rĂ©ellement les participants de l’origine du discours de la Vigie, c’est Ă dire NestlĂ© Waters.
NestlĂ© accusĂ© dâĂ©puiser lâeau de Vittel
La nappe phrĂ©atique de Vittel, largement exploitĂ©e par NestlĂ©, est menacĂ©e dâassĂšchement. La ville devra-t-elle capter son eau potable ailleurs ?
Les habitants de Vittel manqueront-ils dâeau ? Un comble pour cette ville dont la source â largement exploitĂ©e par NestlĂ© Waters depuis plus de trente ans â est rĂ©putĂ©e dans le monde entier.
En cause : la surexploitation de la nappe profonde des grĂšs du Trias infĂ©rieur (GTi), qui sâĂ©tend des Vosges jusquâau Luxembourg.
Eau puisĂ©e pour lâexportation Ă lâĂ©tranger
NestlĂ© a le droit dây puiser chaque annĂ©e un million de mĂštres cubes dâeau pour ses bouteilles exportĂ©es Ă lâĂ©tranger sous la marque Vittel Bonne source et une autre sociĂ©tĂ©, la fromagerie Ermitage, peut puiser 600 000 mĂštres cubes dâeau pour son fonctionnement.
Ă elles deux, ces entreprises consomment prĂšs de 50 % de la ressource en eau ; le reste est rĂ©servĂ© Ă lâeau potable de Vittel et des communes avoisinantes.
Un déficit de 800 000 m3par an
Or, du fait de cette utilisation industrielle massive, la nappe nâarrive plus Ă se rĂ©gĂ©nĂ©rer. Et cette situation nâest pas nouvelle. « Le constat remonte Ă 1975, oĂč le dĂ©ficit atteignait alors 2,5 millions de m3par an, explique Jean-François Fleck, prĂ©sident de lâONG Vosges nature environnement. Il est aujourdâhui stabilisĂ© autour de 800 000 m3par an, ce qui correspond au prĂ©lĂšvement actuel de NestlĂ©. »
Câest seulement depuis 2010 que des solutions sont recherchĂ©es pour tenter dâattĂ©nuer ce dĂ©ficit chronique. Ainsi, la Commission locale de lâeau (CLE) a Ă©tudiĂ© divers scĂ©narios dâĂ©conomie et de transfert dâeau.
Des kilomĂštres de canalisations Ă la charge du consommateur
Le 15 mars dernier, elle a tout bonnement proposĂ©, comme alternative, la construction de dizaines de kilomĂštres de canalisations pour aller chercher lâeau potable dans les territoires voisins.
Le coĂ»t serait de 15 Ă 30 millions dâeuros sur vingt ans ; cela reprĂ©sente, pour le consommateur, une augmentation du prix de lâeau de 0,20 Ă 1 ⏠par m3dâeau.
Chantage Ă©conomique ?
En revanche, la commission nâenvisage nullement de toucher au forage de NestlĂ© Waters â pour lequel, il est vrai, lâentreprise dĂ©tient toujours une autorisationâŠ
« On ne veut pas embĂȘter les industriels », proteste Jean-François Fleck, qui crie au chantage Ă©conomique : « Nous sommes totalement en contradiction avec la loi de 2006 qui rappelle que lâusage prioritaire des ressources en eau est, en France, lâeau potable. »
Incidence sur lâĂ©tiage non Ă©tudiĂ©e
Lâarticle L. 211-1du code de lâenvironnement est en effet assez explicite : « La gestion Ă©quilibrĂ©e [NDLR : de la ressource en eau] doit permettre en prioritĂ© de satisfaire les exigences de la santĂ©, de la salubritĂ© publique, de la sĂ©curitĂ© civile et de lâalimentation en eau potable de la population. »
De plus, le fait de puiser lâeau ailleurs nâa pas fait lâobjet dâĂ©tudes dâimpact suffisantes, telles que lâincidence quâil pourrait avoir sur lâĂ©tiage (niveau moyen le plus bas des cours dâeau). La dĂ©cision finale est attendue pour le dĂ©but de lâĂ©tĂ©.
L’entreprise a finalement rĂ©agi suite Ă la publication de cet article, mercredi 18 avril. Dans un communiquĂ©, NestlĂ© Waters indique notamment avoir rĂ©duit ses prĂ©lĂšvements de 20 % au cours des dix derniĂšres annĂ©es, et avoir proposĂ©, en 2017, de« rĂ©duire volontairement [ses] prĂ©lĂšvements de 25 % des quotas qui [lui] sont allouĂ©s. » Voir le communiquĂ© de NestlĂ©
NestlĂ©: Une citation polĂ©mique de l’ex-PDG sur l’eau refait surface, 13 ans plus tard
- Dans un documentaire diffusĂ© en 2005, Peter Brabeck, alors PDG de NestlĂ©, expliquait quâil faut prendre conscience que lâeau a un coĂ»t afin de la prĂ©server et opposait sa vision Ă celle des ONG.
- Peter Brabeck a ensuite dĂ©veloppĂ© ses propos, expliquant clairement que lâeau est selon lui l’un des droits de lâhomme.
- MalgrĂ© cette mise au point, des internautes continuent de sâindigner des propos tenus en 2005.
La vidĂ©o a Ă©tĂ© filmĂ©e en 2005. Pourtant, 13 ans plus tard, elle continue dâĂȘtre partagĂ©e et diffusĂ©e sur les rĂ©seaux sociaux. Pourquoi une telle longĂ©vitĂ© ? Elle met en scĂšne lâancien PDG de NestlĂ©, qui affirme que lâeau « a une valeur marchande ».
Plusieurs blogs continuent de partager lâextrait vidĂ©o, sâindignant des propos de Peter Brabeck, qui nâest plus PDG de lâentreprise depuis 2008. « Selon le PDG de NestlĂ©, lâaccĂšs Ă lâeau ne fait pas partie des droits de lâhomme, elle doit ĂȘtre privatisĂ©e ! », titre Quel Monde. Lâaccusation est aussi rĂ©guliĂšrement reprise sur les rĂ©seaux sociaux.
FAKE OFF
Quâa vraiment dit lâAutrichien ? Sâexprimant sur la question de la privatisation de lâalimentation en eau, Peter Brabeck explique que « deux points de vue sâaffrontent Ă ce sujet » : « Le premier, que je qualifierai dâextrĂȘme, est reprĂ©sentĂ© par les ONG, pour qui lâaccĂšs Ă lâeau devrait ĂȘtre nationalisĂ©. Autrement dit, tout ĂȘtre humain doit avoir accĂšs Ă lâeau. Câest une solution extrĂȘme. Et lâautre qui dit que lâeau est une denrĂ©e alimentaire et que, comme toute denrĂ©e, elle a une valeur marchande. Il est prĂ©fĂ©rable, selon moi, de donner une valeur Ă une denrĂ©e afin que nous soyons tous conscients quâelle a un coĂ»t, et quâon prenne des mesures adaptĂ©es pour les franges de la population qui nâont pas accĂšs Ă cette eau. Il existe des solutions quâon doit mettre en place. »
Ă Vittel, NestlĂ© contrĂŽle lâeau, la politique et les esprits
NestlĂ© pompe abondamment lâeau de Vittel, dans les Vosges, malgrĂ© un dĂ©ficit inquiĂ©tant de la nappe phrĂ©atique. Ă tel point que la commune va devoir importer de lâeau potable de villages voisins. Depuis prĂšs de trente ans, la multinationale a noyautĂ© le territoire, rĂ©gentant le dĂ©veloppement Ă©conomique et agricole. Elle est lâobjet dâune enquĂȘte pour corruption.
Reporterre le racontait lâan dernier, la multinationale NestlĂ© Waters pompe depuis des annĂ©es les eaux des nappes phrĂ©atiques Ă Vittel pour les embouteiller. Elle y possĂšde une vaste rĂ©serve fonciĂšre et entretient la proximitĂ© avec diverses organisations locales qui comptent. Reporter a poursuivi lâenquĂȘte.
« La vie politique et Ă©conomique est rĂ©gie par un microcosme, un entre-soi qui dĂ©cide de tout, et qui est liĂ© dâune maniĂšre ou dâune autre Ă lâindustrie de lâeau »
EmmitouflĂ© dans sa veste, Didier Thouvenin paraĂźt indiffĂ©rent au courant dâair glacial qui sâinfiltre dans le hangar. Il a la rĂ©volte au cĆur, et ça lui tient chaud. « NestlĂ©, câest un Ătat dans lâĂtat ici,dit-il de but en blanc. Si vous ne marchez pas avec eux, ils vous font caler. »Cet agriculteur vosgien en sait quelque chose. En 2010, il a cherchĂ© Ă acheter les 11 hectares entourant le bĂątiment agricole dont il est propriĂ©taire. « Je voulais mâinstaller comme Ă©leveur laitier, et les terres de mon voisin se libĂ©raient, câĂ©tait une aubaine », prĂ©cise-t-il. En tant que nouvel agriculteur, avec un projet Ă©conomique bien Ă©tudiĂ©, il aurait dĂ» ĂȘtre prioritaire. Mais pas Ă Vittel. Ă lâissue de nĂ©gociations avec lâadministration et les instances agricoles, câest NestlĂ© qui a rachetĂ© les terres⊠tout en lui proposant de les mettre Ă sa disposition, gratuitement, contre la signature dâune convention dite « Ă©cologique ».
à Vittel, Nestlé privatise la nappe phréatique
Ă Vittel, dans les Vosges, NestlĂ© Waters et les habitants pompent la mĂȘme eau. La ressource se rĂ©duisant de façon prĂ©occupante, les autoritĂ©s locales veulent la faire venir des environs pour abreuver la population. La multinationale, elle, pourra continuer de puiser dans le sous-sol.
Cette nappe, que lâon appelle aquifĂšre des grĂšs du Trias infĂ©rieur (GTI), sâĂ©tend de lâAllemagne jusquâaux Cornouailles en passant sous le bassin parisien. Au niveau de Vittel, elle se situe Ă prĂšs de 100 mĂštres de profondeur, et constitue un rĂ©servoir « captif », isolĂ© : lâeau y est emprisonnĂ©e entre des couches gĂ©ologiques relativement impermĂ©ables. CĂŽtĂ© face, cet isolement permet de prĂ©server sa qualitĂ©, car elle est ainsi protĂ©gĂ©e des pollutions. CĂŽtĂ© pile, cette nappe se rĂ©gĂ©nĂšre trĂšs, trĂšs, trĂšs lentement. Et câest prĂ©cisĂ©ment cette ressource peu renouvelable qui intĂ©resse les habitants, pour leur consommation dâeau potable, mais surtout les industriels, qui sont Ă lâorigine de prĂšs de la moitiĂ© des prĂ©lĂšvements.
Pourtant, il faudra attendre 2010 pour que le problĂšme de lâĂ©puisement soit pris au sĂ©rieux. Entre-temps, NestlĂ© Waters est devenu propriĂ©taire des marques en 1992. La multinationale a augmentĂ© le nombre de bouteilles et diminuĂ© le nombre dâemployĂ©s (passĂ©s de 4.500 en 1975 Ă 900 aujourdâhui). Elle pompe dĂ©sormais prĂšs de 800.000 m3dâeau par an (soit 800 millions de litres) de la nappe GTIet exporte lâeau Ă lâĂ©tranger sous la marque Vittel Bonne source. Or, le dĂ©ficit de la nappe est environ dâun million de mĂštres cubes par an. Ainsi « NestlĂ© serait responsable de 80 % du dĂ©ficit », estime Jean-François Fleck, de Vosges nature environnement.
ARTICLE COMPLET – REPORTERRE.net
Contre NestlĂ©, la lutte sâorganise Ă Vittel – 10 mai 2019 – Voir Article Reporterre
NestlĂ© et le commerce de l’eau en bouteille
Alors que lâeau potable se fait de plus en plus rare sur la planĂšte, des multinationales comme NestlĂ© investissent massivement dans le nouveau commerce trĂšs lucratif de lâeau en bouteille. Cet article propose un tour dâhorizon des modalitĂ©s, paramĂštres et consĂ©quences de ce nouveau marchĂ© qui transforme un Ă©lĂ©ment vital en source de profit.
Le nouveau marchĂ© de lâor bleu
On assiste actuellement Ă une crise mondiale de lâeau, qui se manifeste Ă travers la pĂ©nurie croissante dâeau potable et la multiplication des maladies hydriques, causĂ©es par la pollution industrielle, la contamination des lacs et riviĂšres, le traitement insuffisant des eaux usĂ©es, lâassĂšchement des sources, etc. Selon une estimation des Nations Unies, 36â000 personnes meurent chaque jour par manque dâeau potable ou par ingestion dâeau contaminĂ©e ; 1,5 milliards de gens sont privĂ©s dâaccĂšs Ă lâeau, et ce chiffre atteindra en 2025 les deux tiers de la population mondiale . Face Ă cette catastrophe humanitaire, les gouvernements et institutions internationales prĂŽnent la privatisation, la commercialisation et lâexportation de lâeau, justifiant ces mesures par lâeffet prĂ©tendu bĂ©nĂ©fique du libre-marchĂ©. Lors du deuxiĂšme Forum Mondial de lâEau Ă la Haye en 2000, lâeau a Ă©tĂ© officiellement dĂ©finie non pas comme un « bien commun » ou un « droit humain » mais comme un « besoin essentiel », ce qui permet dâen faire dĂ©sormais une marchandise soumise aux lois de lâoffre et de la demande . Les entreprises privĂ©es intĂ©ressĂ©es par le marchĂ© de lâeau soutiennent activement ce programme qui leur ouvre des possibilitĂ©s de profit Ă©normes. Il sâagit dâune part des sociĂ©tĂ©s transnationales de distribution dâeau comme Suez (ex-Suez-Lyonnaise des Eaux) et Veolia (ex-Vivendi), dâautre part des quatre multinationales qui se partagent le marchĂ© de lâeau en bouteille : NestlĂ©, Danone, Coca-Cola et PepsiCo.
Voir Article Association pour le contrat mondial de l’eau
NestlĂ© : une âfausseâ eau de source en bouteille ?
Le gĂ©ant de lâagroalimentaire NestlĂ© a rĂ©cemment Ă©tĂ© attaquĂ© en justice en raison dâune de ses eaux de source vendues en bouteille. Le problĂšme rĂ©side dans le fait que celle-ci ne proviendrait dâaucune source naturelle, comme lâemballage lâindique.
Une fraude Ă lâeau de sourceâ?
Lorsque lâon se rend sur le site officiel de NestlĂ©Ă la page concernant lâeau de source Poland Spring, la marque insiste largement sur lâargument naturel. Depuis 1845, cette eau serait lâune des eaux de source les plus populaires du nord-est des Ătats-Unis. Selon le New York Times,elle gĂ©nĂšre entre300 et 900 millions de dollars par andepuis une dĂ©cennie.
Il y a deux ans, un recours collectif en justiceâ menĂ© par une douzaine de citoyens de huit Ătats amĂ©ricains â a Ă©tĂ© portĂ© devant un tribunal de lâĂtat du Connecticut. Il faut Ă©galement savoir que ce recours avait Ă©tĂ© soutenu par un document. Selon les plaignants, NestlĂ© tromperait ses clients, car lâeau Poland Spring ne proviendrait pas de la source originelleâ situĂ©e dans lâĂtat du Maine â car celle-ci ne coulerait plus depuis maintenant un demi-siĂšcleâ!
Nestlé poursuivi malgré tout
Le 3 avril 2019, un communiquĂ©publiĂ© par NestlĂ© Waters North America relatait une enquĂȘte indĂ©pendantemenĂ©e par le cabinet dâavocats DLA Piper. Selon cette enquĂȘte, lâeau Poland Spring est à «â100 % de lâeau de source naturelleâ»,conforme aux lois des diffĂ©rents Ătats oĂč elle est commercialisĂ©e. Ceci Ă©tant dit, la firme avait ensuite demandĂ© Ă ce que les poursuites soient abandonnĂ©es.
Cependant, le recours collectif avait soulignĂ© un point important qui aurait permis Ă NestlĂ© de se conformer aux lois. En effet, la firme aurait amĂ©nagĂ© â au-dessus dâune Ă©norme nappe phrĂ©atique â pas moins de six sources artificiellesâ! Ainsi, le juge a statuĂ© sur cette affaire et a dĂ©cidĂ© du maintien des poursuites, aprĂšs avoir pourtant rejetĂ© une premiĂšre demande du mĂȘme type en 2018â!
Toujours en 2018, nous Ă©voquions la prĂ©sence de plastique dans 93 % de 250 bouteilles testĂ©espar des chercheurs amĂ©ricains. Celles-ci provenaient dâune dizaine de pays, et certaines Ă©taient estampillĂ©es de grandes marquesâ dont NestlĂ© (Pure Life). Il y a quelques mois, lâONG Break Free From Plastic avait menĂ© une expĂ©rienceafin dâĂ©tablir un classement des marques les plus polluantes. Sur un total de 187 851 dĂ©chets plastiques rĂ©cupĂ©rĂ©s sur plusieurs plages situĂ©es aux quatre coins du monde, le trio de tĂȘte des marques les plus prĂ©sentes Ă©tait composĂ© de Coca-Cola (9 216 dĂ©chets), PepsiCo (5 720) et NestlĂ© (2 950).
Sources : Voxâ Agence Science Presse
NestlĂ© Waters assĂšche les nappes de Vittel sur fond de conflit d’intĂ©rĂȘt Voir ARTICLE
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