Difficile de passer sans voir le message affiché sur un panneau dans un champs, en bordure de l’un des principaux axes routiers de l’île au large du Morbihan.
8 aout 2019 – Trente habitants de Belle-Ile-en Mer ont fait analyser leurs urines et y ont découvert des traces de glyphosate supérieures aux limites autorisées. Ils ont demandé aux élus de l’île d’orienter vers le bio les projets agricoles à venir.
Le 25 mai dernier, trente habitants de Belle-Ile ont prélevé leurs urines avant de les faire analyser par un laboratoire en Allemagne. Deux semaines plus tard, les résultats indiquent la présence de glyphosate dans tous les échantillons étudiés, dépassant de 3 à 27 fois la norme fixée pour l’eau du robinet.
Pour les eaux destinées à la consommation humaine, l’arrêté du 11 janvier 2007 établit la limite autorisée à 0,1 microgramme par litre pour chaque pesticide.
Depuis les résultats, le groupe de « pisseurs involontaires » se mobilise à chaque conseil municipal des quatre communes de l’île. Ils entendent se constituer en association à la rentrée, avant de porter plainte en octobre prochain. Dans cette perspective, ils avaient pris la précaution, au moment des prélèvements urinaires, de respecter un protocole précis : recueil, en présence d’un huissier, des premières urines de la nuit, en étant entièrement déshabillés, hormis les sous-vêtements, afin d’éviter tout biais dans les résultats d’analyse.
Du glyphosate dans l’urine dépassant 14 fois le taux admis dans l’eau, en moyenne
« J’ai 2,27 microgrammes de glyphosate par litre dans mes urines, » annonce Catherine Legras, qui a participé à la « pisserie ». « Comme le petit garçon mentionné sur notre panneau, mon taux de glyphosate dépasse 22 fois les limites réglementaires . Comme cet enfant de 4 ans, je mange des produits sains, bio au maximum, et souvent issus de mon jardin. » La moyenne des 30 échantillons révèle un taux de glyphosate de 1,4 microgramme/ litre d’urine.
« Plus de 150 molécules différentes »
Les regards se tournent logiquement vers l’eau du robinet. Contact est pris avec l’Agence Régionale de Santé (ARS), qui publie chaque année les résultats d’analyse de l’eau de consommation. Du côté des pesticides, aucun dépassement n’y a jamais été relevé. Dans sa version complète, la publication de l’ARS mentionne bien la présence de pesticides, « plus de 150 molécules différentes », selon le déchiffrage auquel s’est livré le groupe de Bellilois. « Mais l’ARS nous a expliqué que 0,03 + 0,01 migrogramme de chaque molécule, au final, ça fait zéro, car cela n’atteint pas les limites réglementaires. »
D’après l’arrêté du 11 janvier 2007 relatif aux limites et références de qualité des eaux destinées à la consommation humaine, si chaque pesticide doit rester en dessous de 0,1 microgramme/litre, le total des différents pesticides cumulés ne doit pas, quant à lui, dépasser 0,5 microgramme par litre d’eau du robinet. L’ARS confirme que l’eau distribuée, puisée dans les barrages de l’île (des vallons qui ont été aménagés en retenues d’eau de pluie), n’atteint pas ce seuil après traitement.
❌ Des projets agricoles désormais au coeur des discussions
Pas de quoi rassurer le groupe de « pisseurs ». Une réunion est annoncée pour septembre prochain avec la Communauté de communes de Belle-Ile. Le groupe d’habitants de l’île espère influer sur l’orientation des projets agricoles soutenus par les élus locaux: le lancement d’une laiterie pour collecter et transformer le lait produit par les élevages îliens, et la promotion de la culture de différentes céréales, associée à un moulin pour fabriquer de la farine.
L’occasion d’encourager la production agricole bio? La tâche s’annonce ardue: pour l’instant, quasiment tous les élevages sont menés en agriculture conventionnelle à Belle-Ile.
Sollicitée, la communauté de communes ne souhaite pas répondre à nos questions.
Article : france3-regions
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