Tous empoisonnés par les PFAS

PFAS : un acronyme unique pour désigner des milliers de molécules différentes

Ils sont connus sous le nom de «produits chimiques éternels» (forever chemicals), car ils sont extrêmement persistants dans notre environnement et dans notre corps.

Ils peuvent entraîner des problèmes de santé tels que des lésions hépatiques, des maladies thyroïdiennes, de l’obésité, des problèmes de fertilité et des cancers.

Avantages éphémères et soucis éternels ?

Les per- et polyfluoroalkylées, plus connus sous le nom de PFAS, sont des substances chimiques dont les propriétés spécifiques sont mises à profit dans de nombreux produits de la vie courante.

Extrêmement persistants, les PFAS se retrouvent dans tous les compartiments de l’environnement et peuvent exposer les populations à travers l’air, les aliments et l’eau de consommation, ou encore l’utilisation de différents produits et objets du quotidien.

Antiadhésives, imperméabilisantes, résistantes aux fortes chaleurs, ces substances sont largement utilisées depuis les années 1950 dans diverses applications industrielles et produits de consommation courante : textiles, emballages alimentaires, mousses anti-incendie, gaz réfrigérants, revêtements antiadhésifs, cosmétiques, dispositifs médicaux, produits phytopharmaceutiques, etc.

Que faut-il savoir sur les PFAS, ces « polluants éternels » ?

Article original – theconversation.com

Alors qu’en France une proposition de loi visant à les interdire est en discussion, les États-Unis ont annoncé le 10 avril dernier établir des seuils limites pour l’eau courante, une première dans ce pays.

Toxicologue, directeur de l’unité Inserm « pharmacologie, toxicologie et signalisation cellulaire » et chef du service de biochimie métabolique à l’hôpital Necker-enfants malades, Robert Barouki nous présente les problèmes posés par ces polluants très persistants.

Robert Barouki : Le terme PFAS désigne une classe de produits chimiques synthétiques présentant la particularité de posséder dans leur structure une chaîne d’atomes de carbone et de fluor plus ou moins longue.

En raison de leurs propriétés antiadhésives, imperméabilisantes, ainsi que de leur bonne résistance à la chaleur et de leur grande stabilité chimique, ils entrent aujourd’hui dans la composition de très nombreux produits du quotidien (lubrifiants, peintures, imperméabilisants, mousses ignifuges destinées à la lutte anti-incendie, emballages alimentaires, fils dentaires, cosmétiques, ustensiles de cuisine…).

The Conversation : cette large utilisation pose problème, car un nombre croissant d’études montre que les PFAS ont des effets délétères sur la santé…

RB : En 2023, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a classé le PFOA (perfluorooctanoic acid ou PFOA en anglais) comme « cancérogène pour les humains » et le (perfluorooctanesulfonic acid ou PFOS en anglais) comme substance « cancérogène possible pour les humains ».

Au-delà du risque de cancer lié aux PFAS, on sait aujourd’hui que ces produits posent également d’autres problèmes.

L’un des plus préoccupants est leur capacité à perturber la réponse immunitaire. Les travaux de Philippe Grandjean avaient montré dès le début des années 2010 que plus des enfants présentaient des taux élevés de contamination par des composés perfluorés, moins leur réponse à la vaccination était efficace (leur corps produisant moins d’anticorps).

Ces résultats sont très solides, car ils ont pu être reproduits expérimentalement chez l’animal.

Par ailleurs, les effets des PFAS ont aussi été constatés lors de contaminations de l’environnement comme celle, emblématique, survenue à Parkesburg, aux États-Unis. Les travaux scientifiques menés alors ont établi un lien entre l’exposition aux PFAS (notamment via les eaux de boisson) et diverses pathologies : l’hypercholestérolémie, la colite ulcéreuse, les maladies thyroïdiennes, le cancer des testicules, le cancer du rein et l’hypertension induite par la grossesse.

Au-delà des altérations des fonctions immunitaires et de l’augmentation du risque de cancers, des études épidémiologiques ont révélé des associations entre l’exposition à certains PFAS spécifiques et divers problèmes de santé : problèmes thyroïdiens, maladies hépatiques et rénales, dysrégulation des lipides et de l’insuline, effets néfastes sur la reproduction et le développement (les femmes exposées aux PFAS durant la grossesse donnent naissance à des bébés dont le poids de naissance est moindre)…

Le problème est que l’on dénombre à l’heure actuelle plusieurs milliers de PFAS, or les travaux scientifiques ne portent que sur quelques-uns d’entre eux seulement. En 2020, l’Autorité européenne de sécurité des aliments – EFSA – a évalué les risques et fixé la dose admissible dans la nourriture pour quatre d’entre eux seulement : le PFOA, le PFOS, l’acide perfluorononanoïque (PFNA) et l’acide perfluorohexane sulfonique (PFHxS).

The Conversation : comment se contamine-t-on ?

RB : Toujours selon l’EFSA, ce sont les produits de la mer, les œufs et les viandes qui contribuent le plus à la contamination par le PFOA et le PFOS. À ce titre, il est intéressant de souligner que les contaminations par les PFAS sont un peu atypiques, elles sont plus élevées dans les catégories socioprofessionnelles plus favorisées, car les personnes qui sont plus à l’aise financièrement consomment plus de poissons ou de produits de la mer.

L’eau destinée à la consommation peut aussi être une source d’exposition, tout comme l’air intérieur et extérieur, les poussières ou les sols contaminés. Des expositions professionnelles peuvent aussi se produire, dans divers secteurs industriels (industrie chimique, textile, électronique…). Les niveaux d’imprégnation les plus élevés sont d’ailleurs relevés chez les employés de sites de fabrication de PFAS.

Une étude récente menée en Europe a révélé que nous avons presque tous des PFAS en nous et qu’environ 10 à 15 % de la population présente une concentration sanguine en PFAS qui dépasse la valeur seuil (celle-ci a été établie de façon très conservative, il ne s’agit pas d’une valeur établissant un seuil de toxicité). Comme avec tous les polluants, les contaminations qui concernent les femmes enceintes et les enfants sont considérées comme les plus problématiques.

The Conversation : la situation est d’autant plus préoccupante que les PFAS sont partout, et pour longtemps…

 

Cliquez sur la carte et explorez l’Europe de la contamination par les PFAS

Cette carte de la pollution éternelle aux PFAS en Europe, publiée par le journal Le Monde, a été élaborée dans le cadre de l’enquête collaborative internationale Forever Pollution Project.

RB : L’EFSA classe les PFAS dans la catégorie des composés très persistants et très mobiles (« very persistent, very mobile »).

Très persistants, car les PFAS sont très stables. Ils ne sont pas dégradés dans l’environnement, et une fois qu’ils pénètrent dans notre organisme, il est très difficile de les en chasser. Contrairement à certains autres polluants comme le bisphénol A, qui vont être éliminés rapidement dès lors que l’on cesse d’y être exposé, les PFAS persistent dans le corps pendant plusieurs années. Par ailleurs, leurs propriétés chimiques leur permettent de se fixer aux protéines, ils peuvent donc se retrouver un peu partout dans l’organisme.

Malheureusement, les effets de la fixation des PFAS sur les fonctions des protéines ont été très peu étudiés, on ne sait donc pas vraiment quelles en sont les conséquences. Actuellement, on ne connaît pas vraiment le mécanisme d’action de ces composés.

Outre la grande stabilité chimique des PFAS, une autre de leurs propriétés est très problématique. Si l’on observe une molécule de PFAS, on constate qu’elle possède un côté hydrophile (qui aime l’eau) et un côté très hydrophobe (qui aime le gras). Résultat : les PFAS sont à la fois solubles dans les graisses et dans l’eau. Cela les rend très mobiles dans l’environnement. Une fois dans les sols, ils vont pouvoir diffuser, et entraîner non seulement une contamination de la terre ou des sédiments, mais aussi des eaux. Ils peuvent ainsi se retrouver à très grande distance des endroits où ils ont été produits, utilisés, ou jetés (décharges)…

Étant donné l’analogie de structure qui existe entre les milliers de PFAS connus, la grande question est de savoir si les propriétés des trois ou quatre molécules qui ont été le plus étudiées sont partagées par toutes les autres… C’est probable, mais le problème est que pour l’établir scientifiquement, il faudrait refaire les mêmes études sur chaque PFAS connu, ce qui prendrait des décennies…

The Conversation : à ce sujet, les tests réglementaires actuels sont-ils adaptés ?

RB : Il ne faut pas négliger l’avancée qu’a constituée le fait d’imposer des tests réglementaires à l’industrie avant la mise sur le marché de nouveaux produits. Initialement, les tests étaient très rudimentaires. La contrepartie à la mise en place de tests plus élaborés et bien construits a été d’en limiter le nombre.

Le problème est que l’évolution de ces tests se fait très lentement, en regard des nouvelles découvertes scientifiques. Un exemple emblématique est la question des effets de perturbation endocrinienne de certains produits chimiques. Leur existence, soupçonnée depuis les années 1960, a été démontrée depuis plusieurs décennies. Pourtant, à l’heure actuelle, les tests réglementaires ne sont toujours pas conçus pour détecter de tels effets.

Même chose pour l’immunotoxicité : des tests existent, mais ils ne sont pas tous obligatoires. Or, dans le cas des PFAS, c’est la toxicité sur le système immunitaire qui a permis d’établir la valeur seuil. Cela ne correspond pas du tout à l’approche classique (habituellement on se base plutôt sur les effets en matière de cancérogenèse ainsi que quelques autres impacts), et plaide donc pour une évolution des tests pour prendre systématiquement en compte ce genre d’effet.

Le problème est que les modifications proposées doivent être acceptées par l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques). Or, le processus est très lent, et très lourd. Il peut prendre jusqu’à 10 ans. Cela décourage beaucoup de chercheurs, d’autant plus que ces travaux ne sont pas valorisables en tant que recherches scientifiques. Or, les chercheurs sont financés pour trouver de nouveaux résultats, pas pour établir des protocoles de test.

Il faudrait probablement créer un organisme dédié à ce genre de mise au point.

The Conversation : pourrait-on imaginer des alternatives aux PFAS ?

RB : Intellectuellement, je n’exclue pas que la possibilité de mettre au point des composés qui soient dotés des mêmes propriétés, tout en étant plus inoffensifs. Il n’y a pas de raison fondamentale pour que lesdites propriétés soient fatalement associées à de la toxicité. Mais l’on ne pourra en être certain que le jour où l’on comprendra vraiment le mécanisme d’action aboutissant à la toxicité que l’on constate.

En tout cas, pour le moment, je ne pense pas qu’il existe de substituant assez convaincant. Il y a quelques années, on avait parlé du GenX, un PFAS dont la demi-vie (temps nécessaire à une diminution de moitié de la concentration, ndlr) est un peu plus courte que les autres. Mais on s’est aperçu ensuite que lui aussi pose problème

The Conversation : un projet de loi visant à interdire l’utilisation des PFAS est en discussion en France. Le texte a été adopté à l’Assemblée, cependant les députés ont voté pour exclure les ustensiles de cuisine, sous la pression des industriels. Qu’en penser ?

RB : Il est toujours difficile de passer de la science à la décision politique. Il faut souligner que les revêtements des ustensiles de cuisine sont constitués de polymères. Dans un tel cas, les données scientifiques disponibles semblent indiquer que la toxicité n’est pas aussi inquiétante que dans le cas de PFAS « liquides », tels que le PFOA ou le PFOS. Cependant, on dispose de moins d’études concernant les polymères, et de nombreuses questions demeurent : que se passe-t-il quand ils se dégradent ?

Risque-t-on d’absorber des particules de polymères ?

Avec quelles conséquences ?

Par ailleurs, pour les produire, il faut recourir à des PFAS sous des formes plus problématiques, ce qui pose la question des contaminations professionnelles ou environnementales. Il aurait peut-être été préférable d’interdire également les polymères, tout en accordant un délai aux industriels. Fixer une date limite les aurait probablement poussés à rechercher des alternatives.

The Conversation : faudrait-il envisager un étiquetage spécifique des produits qui contiennent des PFAS ?

RB : Les gens devraient être informés de la composition des produits de consommation, afin de pouvoir connaître les risques et décider s’ils choisissent ou non de s’y exposer. Je suis personnellement favorable à la mise en place d’un étiquetage de type « Toxi-score », inspiré du logo alimentaire « Nutri-score ».

Un tel affichage pourrait également pousser les industriels à rechercher des solutions alternatives, afin de faire du « sans PFAS » un argument marketing…

The Conversation : est-ce qu’il faudrait envisager une recherche systématique des PFAS sur tout le territoire ?

RB : Faire un état des lieux national pourrait être à envisager, même si les zones à surveiller en priorité sont bien entendu celles où sont produits les PFAS.

Quant à l’intérêt d’effectuer un suivi régulier dans le temps, la question mérite d’être posée, mais il est difficile d’y répondre.

The Conversation : existe-t-il des solutions pour décontaminer l’environnement… ou l’être humain ?

RB : C’est très compliqué. Des systèmes de filtration ou d’extraction par chromatographie peuvent améliorer la qualité de l’eau, mais sans éliminer complètement les PFAS. En ce qui concerne les sols, malheureusement, il n’y a pas de solution. On pourrait imaginer essayer de prélever la terre polluée, la traiter, puis la remettre dans le milieu. Des tests en ce sens sont actuellement menés en laboratoire, mais il est inenvisageable de pouvoir les déployer à grande échelle. La situation présente beaucoup de similitudes avec le problème du chlordécone aux Antilles

Quant à employer des médicaments pour éliminer les PFAS de l’organisme, je suis très méfiant. Cela pourrait être une approche à envisager dans le cas d’une contamination massive de travailleurs, par exemple. Une étude a notamment montré que des chélateurs utilisés pour traiter le cholestérol peuvent diminuer de moitié la quantité de PFAS dans le sang. Mais ce n’est pas une solution envisageable à l’échelle d’une population, car tout médicament peut, lui aussi, présenter une certaine toxicité.

Quelles conséquences pour la santé ?

L’ensemble de la population est contaminé, essentiellement par ingestion via l’eau et les aliments, ou par inhalation. L’étude nationale de santé Esteban (1) de 2014-2016 a détecté des PFAS chez 100 % de la population suivie, enfants comme adultes. En 2019, Que Choisir a effectué des prélèvements de poussière dans 53 maisons et appartements en France : 93 % étaient pollués par le PFOS.

L’organisme les éliminant lentement, ces substances s’accumulent dans le corps. Or, les effets délétères sur la santé sont multiples, et potentiellement graves : certains PFAS sont toxiques pour le foie et le rein, soupçonnés d’être cancérogène, neurotoxiques, reprotoxiques et perturbateurs endocriniens, ou favoriseraient l’obésité et le diabète de type 2… Certains sont particulièrement inquiétants, à l’instar du PFOA (reconnu « cancérogène pour les humains » par le Centre international de recherche sur le cancer (Circ) le 30 novembre 2023), du PFOS (reconnu « cancérogène possible »), du PFNA et du PFHxS (2). Et on sait désormais que certains de leurs métabolites (composés issus de leur dégradation) sont encore plus toxiques que les molécules initiales.

Les PFAS sont à l’origine de nombreux effets néfastes pour la santé.

Comment éviter les PFAS ?

Éliminer les PFAS de son environnement s’avère mission impossible, ces composés étant omniprésents. Les limiter est très compliqué. Individuellement, vous n’avez pas de prise sur les rejets industriels. Concernant les objets du quotidien, la tâche est également ardue. Voici néanmoins quelques pistes.

  • Optez pour des ustensiles de cuisine sans revêtement antiadhésif contenant des PFAS : céramique, aluminium, fonte, cuivre, fer, acier… Attention, certains ont d’autres inconvénients.
  • Évitez les produits alimentaires emballés achetés en grande surface ou dans les fast-foods.
  • Évitez l’utilisation d’eau souterraine (puits privés) pour arroser les fruits et légumes du potager ou abreuver les animaux de basse-cour.
  • Réduisez la consommation de poissons (surtout les gras) et fruits de mer, de viandes, de produits laitiers et d’œufs.
  • Lavez les vêtements neufs avant de les porter.
  • Évitez d’acheter des vêtements imperméables ou déperlants.
  • N’utilisez pas de spray imperméabilisant.
  • Évitez les tissus d’ameublement ayant subi des traitements antitaches.
  • Attention aux cosmétiques et aux produits ménagers. Consultez la liste des ingrédients et fuyez ceux qui contiennent des PFAS. Bon à savoir, ils sont interdits dans les cosmétiques bio labellisés Cosmébio.
  • Contribuez à limiter les fuites de PFAS dans l’environnement en jetant ou en recyclant vos produits via les filières adaptées.

Source : Que Choisir – Février 2024

Vers une interdiction de production des PFAS ?

Si certains PFAS ne sont déjà plus produits, l’Europe se penche quant à elle sur une interdiction totale de production de tous les PFAS. L’Agence Européenne des Produits Chimiques a présenté en 2023 une proposition de restriction sur les PFAS menée par l’Allemagne, le Danemark, les Pays-Bas et la Norvège. Si elle est acceptée, cette proposition serait la plus importante jamais adoptée puisqu’elle s’appliquerait à des milliers de molécules.

Il convient cependant de rappeler qu’en Europe, l’usage des PFAS est déjà réglementé et que ces molécules bénéficient d’une surveillance accrue. Pour les denrées alimentaires, l’Agence européenne de sécurité des aliments a établi un seuil de sécurité pour 4 PFAS (PFOS, PFOA, PFNA et PFHxS) à 4,4 ng/kg de poids corporel. Depuis janvier 2023 les seuils maximums de PFAS autorisés dans les aliments est soumis à une législation européenne spécifique. 

RECOMMANDATION (UE) 2022/1431 DE LA COMMISSION du 24 août 2022

La prudence en attendant de nouveaux résultats

D’ici 2026, l’équipe de l’université de Nouvelle-Galles du Sud prévoit de publier des études qui expliquent comment les PFAS s’associent à différentes parties de l’environnement et de notre corps comme les , par exemple. En attendant, ils appellent les fabricants et les consommateurs à se montrer prudents et à faire preuve de « diligence raisonnable »lorsqu’ils utilisent des produits contenant des PFAS. « Nous fabriquons et distribuons beaucoup de produits chimiques sans avoir une évaluation complète de leurs impacts potentiels sur la santé, disent-ils. Ce n’est pas parce que certains de ces produits chimiques sont disponibles que nous devons les utiliser ».

L’histoire des PFAS

Le Téflon®, première molécule de la famille des PFAS

Les substances perfluoroalkylées (PFAS) sont des composés chimiques totalement anthropiques, c’est-à-dire qu’ils ont été créés par l’Homme. Ils sont formés volontairement, mais aussi parfois involontairement par certains procédés industriels.
Le premier composé de la famille des PFAS est le Polytetrafluoroethylène (PTFE) ou Téflon ® qui a été découvert accidentellement en 1938 par la firme DuPont de Nemours aux Etats-Unis. En essayant de refroidir un gaz avec de la neige carbonique, le chercheur a obtenu une poudre polymérisée soluble dans quasiment aucun solvant et résistante à des températures supérieures à 260°C. A l’époque, les chercheurs n’ont trouvé aucune propriété intéressante au PTFE et la molécule n’a pas été exploitée.

C’est seulement en 1940, à l’occasion du projet de développement de la bombe atomique américaine dans le cadre du projet Manhattan, que le PTFE a été utilisé pour la première fois. Les chercheurs avaient en effet besoin de joints résistants aux solvants et aux refroidissants extrêmement puissants utilisés pour maîtriser la phase d’enrichissement de l’Uranium 235.

La molécule a été déclassifiée en 1949, année où DuPont de Nemours a déposé la marque Teflon® et commencé à commercialiser le PTFE à grande échelle via une importante campagne commerciale entre 1954 et 1960. Il était utilisé à la fois dans l’industrie et dans les produits de consommation courante. La première utilisation du PTFE dans les ustensiles de cuisine remonte à 1951.

Une utilisation large jusqu’aux années 2000

Les PFAS ont connu un second essor dans les années 1960 avec le développement de l’AFFF (Agent Formant un Film Flottant), une mousse filmogène aqueuse utilisée pour l’extinction des incendies (en particulier ceux associés à des hydrocarbures).
Par la suite, l’utilisation des PFAS dans l’industrie et à travers le monde n’a cessé de s’accroître en raison de leurs multiples propriétés extrêmement intéressantes comme :

  • La résistance aux hautes températures bien sûr mais aussi à l’huile, à l’eau et aux produits chimiques,
  • Leurs propriétés tensioactives,
  • Leur capacité à réduire les frictions.

Tous les PFAS ne partagent pas les mêmes propriétés physico-chimiques et donc le même intérêt pour l’industrie : les caractéristiques de chaque molécule dépendent de la longueur de leurs chaînes carbonées et des groupements chimiques associés.

Des scandales sanitaires à partir des années 2000

Le premier scandale sanitaire de grande ampleur relatif aux PFAS date de 2001 aux Etats-Unis : la firme DuPont est accusée d’avoir contaminé avec le PFOA (acide perfluorooctanoïque) plus de 70 000 personnes. Une affaire relatée en 2019 dans le film Dark Waters de Todd Haynes.
A partir des années 2000, plusieurs études scientifiques ont également pointé du doigt les conséquences potentielles des PFAS sur la santé humaine et sur l’environnement. Le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC) a notamment classé le PFOA, l’un des PFAS utilisé pour la production du Téflon®, comme un cancérigène de groupe 2B, c’est-à-dire potentiellement cancérigène pour l’Homme.
La Convention de Stockholm a restreint à partir de 2019 l’utilisation du PFOS (sulfonate de perfluorooctane) et interdit l’import, l’export et la production du PFOA  en 2019 puis du PFHxS (acide perfluorohexane sulfonique) en 2023.

Depuis, les choses s’accélèrent dans le monde et en Europe en particulier alors que l’opinion publique est de plus en plus consciente du sujet.

Source : solutionsdurables.eurofins.fr